Les messages de l’ARN

Depuis la Covid-19 le grand public sait que la molécule d’ARN (acide ribonucléique) transmet un message. Pour nous décrire les nombreux autres rôles de cette molécule, Patrice Debré, professeur émérite d’immunologie à Sorbonne Université, choisit de nous rapporter ses conversations, réelles ou imaginaires, avec différents chercheurs. Il convoque en particulier François Jacob et Jacques Monod, pour lesquels il a une grande admiration, replaçant ainsi les nouvelles découvertes dans leur contexte historique. Des anecdotes personnelles agrémentent le récit, le rendant vivant et agréable à lire malgré la complexité du sujet traité.

Le titre du premier chapitre « Génétique et théorie de l’information » décrit l’angle utilisé pour décrire les fonctions de l’ARN. Après un rappel détaillé des bases de la génétique, de la nature des molécules d’acides nucléiques et du fonctionnement du système immunitaire, l’auteur nous présente les différentes molécules d’ARN (messagers, régulateurs ou de transfert) et montre l’importance de leur rôle dans l’expression et la régulation de l’information codée par l’ADN.

La conception du vaccin anti-Covid-19 à ARN est sans surprise le thème d’un chapitre essentiel. On y découvre comment la focalisation des recherches sur l’ADN, molécule très stable, a freiné le développement des vaccins utilisant l’ARN, beaucoup plus fragile. La collaboration multidisciplinaire ayant permis le développement de méthodes pour stabiliser la molécule, l’encapsuler et lui permettre de pénétrer dans les cellules afin d’activer le système immunitaire est passionnante à suivre. Cette partie nous entraîne en Afrique du Sud, à la rencontre d’un chercheur travaillant pour une société de biotechnologie spécialisée dans la diffusion des vaccins à ARN sur ce continent. Ce récit met en évidence les difficultés de la mise sur le marché des vaccins, depuis la start-up en biotechnologie s’engageant parfois financièrement à perte dans des recherches infructueuses, jusqu’au dépôt de brevets et à la production industrielle.

Le futur est évoqué dans le chapitre « Thérapies ARN ». Le potentiel immense de ces molécules en matière de soins ou de vaccins, ainsi que les problématiques associées à ce développement sont bien exposés.

La conclusion, au titre un peu provocateur, « L’hérédité avec ou sans gène », résume le contenu du livre et modère le rôle primordial généralement accordé à l’ADN dans la transmission génétique.

Une bonne connaissance des bases de la biologie moléculaire et du fonctionnement cellulaire est nécessaire pour apprécier pleinement cet ouvrage. Cependant nul doute que ceux dont les études datent un peu apprécieront le style de la présentation et seront heureux de mettre à jour leurs connaissances pour mieux comprendre les usages présents et futurs de ces molécules.