Neuro-science-fiction
Publié en ligne le 7 janvier 2023Les cerveaux d’ailleurs et de demain
Éditions Le Bélial’, coll. « Parallaxe », 2022, 280 pages, 18,90 €

À la confluence de la science-fiction et de la vulgarisation scientifique existe un genre d’ouvrage assez plaisant, qui part des imaginations les plus folles du cinéma et de la littérature d’anticipation pour faire un tour d’horizon de l’état actuel des connaissances scientifiques. Neuro-science-fiction s’inscrit dans cette tradition. L’auteur, Laurent Vercueil, est neurologue au CHU Grenoble Alpes et à l’Inserm et a publié d’autres ouvrages grand public sur le cerveau et son fonctionnement.
Ici, le cerveau imaginé des extra-terrestres, depuis La Guerre des mondes jusqu’à Alien, et celui des surhommes potentiels du futur sont examinés à la loupe pour mettre en lumière par contraste ce que nous savons de notre encéphale d’Homo sapiens de base. Ainsi, l’absence d’empathie et d’émotions des Martiens d’H.-G. Wells sert de point de départ pour explorer les structures de notre cerveau impliquées dans la formation et l’expression des émotions ; mais aussi le concept de « théorie de l’esprit », la faculté qui permet à un individu de se former un modèle mental de ce que peut penser ou ressentir autrui, ce qui est crucial pour une espèce sociale. Des êtres totalement dépourvus d’empathie seraient donc handicapés, à moins de vivre en solitaire.
L’ouvrage explore de grands thèmes des neurosciences : l’intelligence (et notre désir de l’augmenter), le besoin que tout cerveau a de dormir, la possibilité (ou non) de transplanter un cerveau ou de le faire vivre hors du corps, mais aussi la mémoire et ses manipulations, la perception du temps… Chaque chapitre expose non seulement l’état actuel des connaissances, mais aussi l’histoire des idées en la matière, y compris les dévoiements de la science du cerveau, telle la craniométrie ou les mauvais usages du QI documentés par Stephen Jay Gould dans La Malmesure de l’homme.
Dans l’ensemble, le ton de l’ouvrage n’est pas celui de la gravité, et le corpus de science-fiction exploré offre un voyage dépaysant et varié, avec les classiques Wells, Asimov et Le Meilleur des mondes, mais aussi des œuvres plus récentes d’auteurs comme Nancy Kress ou Ted Chiang, ou encore le film Inception. On en sort avec une meilleure appréciation de notre cerveau, et le désir de se plonger ou replonger dans quelques bons ouvrages de science-fiction.
Publié dans le n° 344 de la revue
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