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BIAIS COGNITIF EXPRESS

À la louche, c’est louche

Publié en ligne le 30 décembre 2022 - Statistiques et probabilité -
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Raisonnement logique

Quand on élabore un raisonnement ou une démarche argumentative, le cerveau réfléchit en utilisant les éléments présents dans sa mémoire et en passant d’un concept ou d’une idée à une autre. Mais cet enchaînement d’idées ne se fait pas de manière purement logique ou cartésienne, même si l’on peut en avoir l’impression quand on raisonne. Le cerveau passe d’une information à une autre, d’une donnée à une autre, en suivant des liens qui peuvent reposer sur des relations de proximité perceptive, des analogies, des liens personnels, des émotions, etc.

Dans le cas d’une démarche argumentative abstraite, une conclusion doit se déduire logiquement de prémisses ou de données pour être valide. Si le lien entre les prémisses et la conclusion n’est pas logique, on peut alors parler de biais d’argumentation. Un raisonnement logique et formel est une démarche complexe d’abstraction qui demande un long apprentissage. Quand il s’agit en plus de manipuler des concepts mathématiques (des nombres, des courbes, des moyennes…), le raisonnement logique doit être parfaitement maîtrisé et les règles mathématiques suivies à la lettre pour éviter des erreurs d’interprétation.

De l’art d’interpréter les chiffres

Durant la pandémie de Covid-19, beaucoup de chiffres et de statistiques ont été présentés au public, donnant lieu à des interprétations pas toujours très justes. Par exemple, quelques semaines après le début du premier confinement au printemps 2020, un philosophe s’étonnait de l’« affolement collectif » suite à l’arrivée du virus [1]. Il comparait le no²mbre de décès dus à la covid à celui de la grippe de Hong Kong ou de la grippe asiatique : « La grippe de Hong Kong dans les années 1960 a fait un million de morts. La grippe asiatique, dans les années 1950, a tué plus d’un million de personnes. Autant dire beaucoup plus qu’aujourd’hui dans le monde. On en est à 120 000 morts. » Comparer un mois d’épidémie de covid et environ deux années d’épidémies des deux grippes citées est un raisonnement statistique et épidémiologique incomplet, hasardeux et non justifié qui peut conduire à des raisonnements et des conclusions erronés.

Au moment de l’écriture de cet article, soit deux ans après le début de la pandémie (durée comparable aux grippes de Hong Kong et asiatique), le bilan mondial des décès liés à la covid dépasse les six millions. On est bien loin de la comparaison proposée par le philosophe.

Présenter des chiffres peut donner lieu à de mauvaises interprétations si l’on ne fait pas les calculs nécessaires pour en extraire des statistiques ou des comparaisons légitimes. Cela peut demander un effort cognitif plus ou moins complexe et surtout des compétences mathématiques et statistiques que nous n’avons pas forcément. L’exemple et l’activité proposée (lien en début d’article) concernant le paradoxe de Simpson illustrent ce besoin d’expertise pour pouvoir calculer des statistiques et les interpréter de manière exacte.

Publié dans le n° 341 de la revue


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À seconde vue

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