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Les décodeuses du numérique

Publié en ligne le 19 novembre 2021
Les décodeuses du numérique
Léa Castor, Célia Esnoult, Laure Thiébault
CNRS Éditions, 2021, 64 pages, 6 €

Les femmes sont très minoritaires aujourd’hui dans beaucoup de métiers de l’informatique (largement rebaptisée « numérique » dans le langage contemporain), y compris dans la recherche scientifique. Cet ouvrage édité par le CNRS s’adresse d’abord aux lycéennes et étudiantes en leur présentant une dizaine de profils de chercheuses en informatique, avec l’objectif de les intéresser à ces carrières. « Pourquoi se priver de la moitié des cerveaux de l’humanité ? » se demande ainsi une des protagonistes (oubliant qu’entre les populations des pays pauvres et la majeure partie des classes populaires de tous les pays, le chiffre des « cerveaux de l’humanité dont on se passe » est probablement plus proche de 90 à 95 %). Le parti pris est celui d’une bande dessinée au style enfantin et quelque peu lénifiant. Certaines des chercheuses présentées sont affublées de titres fantaisistes (« super-chercheuse », « détective publique », « agent spécial »), comme si leur qualité réelle devait être ennuyeuse ; et le discours, écrit à la première personne, égrène les « je » sur un mode narratif qui rappelle un peu les productions narcissiques des réseaux sociaux (« j’adorais les petits-suisses »« j’étais passionnée par les maths »« j’ai passé une partie de ma carrière aux USA »…). Et pourtant, les protagonistes ont un parcours brillant qui mériterait une présentation plus sérieuse et plus détaillée. Leur diversité disciplinaire (de l’algorithmique au traitement du signal en passant par le Web sémantique ou l’optimisation de l’efficacité énergétique des centres de données) et la vulgarisation, hélas trop concise, qui en est faite peut susciter de véritables envies chez une lectrice (ou un lecteur !) jeune ou moins jeune, à condition de passer outre le style de l’ouvrage, son obsession biographique et son léger mépris – paradoxal – pour celle ou celui qui le lira.