Du manioc dopé avec des protéines
Publié en ligne le 26 octobre 2011 - OGM et biotechnologies -Voir Transgénèse : retrait d’un article.
Le manioc est, parmi les plantes très consommées et riches en calories (essentiellement sous forme d’amidon stocké dans le tubercule), celle qui contient le moins de protéines, ce qui induit des carences alimentaires chez les 700 millions de personnes qui en font leur ordinaire.

Le Donald Danforth Plant Science Center, (St. Louis, Missouri, USA) a réussi à obtenir un manioc génétiquement modifié qui contient quatre fois plus de protéines que son homologue traditionnel. Ceci a été rendu possible en transférant dans le manioc le gène de la zéoline, une protéine présente dans de nombreuses plantes comestibles et connue pour contenir une proportion équilibrée d’acides aminés. La plante ne présente pas d’altération de ses propriétés agronomiques et la quantité d’amidon qu’elle contient n’est pas diminuée. La valeur alimentaire du manioc se trouve donc ainsi très significativement améliorée en qualité et en quantité.
Un enfant de deux ans pour lequel le manioc traditionnel représente 50 % des calories qu’il ingère reçoit ainsi trois grammes de protéines, ce qui ne représente que 20 % des ses besoins quotidiens. La même consommation du manioc dopé en zéoline apporte 16 grammes de protéines par jour, soit plus de 100 % des besoins quotidiens de l’enfant [1].
Un grand nombre de plantes contient des toxines diverses ainsi que des substances anti-nutrionnelles qui perturbent la digestion des aliments. Ces substances ont pour effet de dissuader les consommateurs de les manger. Le gossipol est une des toxines du cotonnier (dont le nom latin est gossipium). Le gossipol n’est pas un poison mortel mais il altère la santé des consommateurs animaux. Seuls les ruminants dont le système digestif est très performant peuvent consommer les tourteaux qui constituent la partie riche en protéines qui reste après extraction de l’huile des graines de cotonnier. Les produits dérivés des graines de cotonnier rendent par ailleurs les hommes stériles. Des variétés de cotonnier dépourvues de gossipol ont été obtenues par sélection classique. Ces variétés sont devenues plus sensibles aux insectes et elles sont de ce fait impropres à la culture, même avec une utilisation intense de pesticides, déjà élevée pour les variétés classiques. Un cotonnier obtenu par transgénèse, qui a gardé son gossipol dans le corps de la plante mais non dans la graine, a gardé une résistance normale contre les insectes et sa graine est devenue consommable.
L’organisme qui a développé ce projet est une fondation privée financée par un mécène et par d’autres fonds publics et privés. Ce laboratoire recrute plus particulièrement des jeunes chercheurs des pays en développement qui contribuent à mettre au point des variétés de plantes capables de pallier certaines des carences alimentaires dont souffrent leurs concitoyens. Ce cas n’est pas unique. Le riz doré supplémenté en vitamine A ainsi qu’en fer, les pommes de terre boliviennes résistantes à des nématodes, les protéines de la graine de cotonnier débarrassées du gossipol (voir encadré) toxique et potentiellement utilisable par cinq cent millions de consommateurs, les papayers d’Hawaï résistants à un virus et quelques autres projets en cours sont dans une situation analogue dans la mesure où ils sont développés indépendamment des grandes entreprises qui se partagent l’essentiel du marché des OGM.
[1] Abhary M., Siritunga D., Stevens G., Taylor N. J., Fauquet C. M. Transgenic Biofortification of the Starchy Staple Cassava (Manihot esculenta) Generates a Novel Sink for Protein. 2011, PLoS One. 6, pp. e16256. doi :10.1371/journal.pone.0016256
Publié dans le n° 297 de la revue
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L' auteur

Louis-Marie Houdebine
Louis-Marie Houdebine (1942-2022) était directeur de recherche honoraire à l’INRA. Il a été membre de la Commission du (...)
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