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L’homéopathie revisitée

Publié en ligne le 1er avril 2024 - Homéopathie -

Dans notre difficile combat contre l’obscurantisme et les pseudo-sciences, il arrive que nous ayons quelques encouragements. Aujourd’hui, en voilà un venant de certains homéopathes, lecteurs de notre revue, sensibles à nos arguments et désireux de se rapprocher de la méthode scientifique.

Plusieurs aspects de l’homéopathie la rendent incompatible avec la science telle que nous la connaissons, mais le principal est certainement les dilutions extrêmes, qui font disparaître la moindre molécule de produit « actif » des préparations homéopathiques.

Les professeurs S. Padont et S. Turjond ont donc réfléchi à une solution. Elle est simple, mais il fallait y penser : pour augmenter les chances de « tomber » sur un granule où la molécule de produit actif serait présente, ils ont augmenté drastiquement les doses. Au lieu de quelques granules, ils ont calculé qu’avec 500 tubes, le patient augmentait ses chances de 20,57 %. Ça vaut le coup d’essayer. À ceux qui estiment qu’il est difficile d’ingérer 500 tubes en une seule prise, je ferai remarquer qu’on consomme bien cinq fruits et légumes par jour ! Ce n’est pas toujours si aisé, mais que ne ferait-on pas pour notre santé…

Cependant, conscients que c’est tout de même contraignant, nos deux chercheurs orientent maintenant leurs recherches vers une plus grande concentration de principe actif au sein de chaque granule. Affaire à suivre…

Ils ne se sont pas arrêtés là. Estimant également que les produits utilisés pour leurs préparations ne sont pas franchement… « médicaux », ils ont établi une nouvelle liste de produits. Terminés les « foies de canard pourris » [1], les vers de terre et les broyats d’abeille. Désormais, ils entendent tester leurs préparations en double aveugle, et pour augmenter leurs chances de succès, commencent avec de vrais médicaments. Ils obtiendront certainement assez vite ainsi le dosage idéal, à l’efficacité maximale.

Un aspect souvent vanté de l’homéopathie est la « personnalisation ». L’homéopathe serait, plus qu’un médecin, à l’écoute de son patient, et étudierait le « terrain » de chacun avant de décider de son traitement. Pour nos chercheurs, sans remettre en question l’attention portée au patient, cette personnalisation peut être un frein. Ils souhaitent plutôt ré-universaliser leur discipline, pour une raison simple et difficilement contestable : si leurs recherches, comme on peut le penser, aboutissent, comment et pourquoi en priver certains ?

Une autre base de l’homéopathie se résume dans le principe « les semblables sont guéris par les semblables ». Ne pouvant que constater l’échec (sans même parler de l’inanité) de ce concept, S. Turjond et S. Padont, suite à un intense travail de réflexion, ont abouti au principe « les contraires soignent les semblables ». Ils proposent donc de renverser l’homéopathie, mais au nom de son progrès et de la poursuite de ses succès. Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain… Le procédé sera simple : toutes les préparations homéopathiques existantes seront, dans un premier temps, ré-orientées au diagnostic inverse de ce qui est prévu à l’heure actuelle. Et dans un deuxième temps, au lieu par exemple de préparations qui rendent fiévreux pour faire baisser la fièvre, on donnera un médicament contre la fièvre. Avouons que la piste est engageante !

Enfin, nos chercheurs ont pu calculer qu’en respectant ces quelques aménagements, ce léger toilettage de l’homéopathie, il ne sera plus nécessaire de perdre un temps (et un argent) fou à « dynamiser » les préparations en les remuant dans tous les sens. C’est autant d’économisé ! (Mais chaque médecin homéopathe sera libre, à la place, d’aller “se dynamiser” et remuer lui-même en boîte de nuit, ne serait-ce qu’en mémoire de leur pratique passée).

Forts de ces nouvelles orientations, tout à fait prometteuses, nous ne pouvons qu’encourager ces chercheurs originaux dans cette voie, et nous pourrons sans doute crier bientôt tous ensemble : « Vive la (nouvelle) homéopathie ! »1.

1 Messieurs Padont et Turjond sont en léger désaccord ici : S. Padont préconise ce terme de « nouvelle homéopathie », quand M. Turjond préconise un autre terme : « Médecine ». Ici aussi, affaire à suivre…

Eh non… Les homéopathes n’ont malheureusement pas (encore ?) eu l’idée de réinventer leur discipline… Les professeurs espadon et esturgeon vous avaient certainement mis sur la voie des poissons, et plus particulièrement de celui d’avril. Ce n’est que grâce à lui qu’une démarche vraiment scientifique pouvait être entreprise pour « sauver » l’homéopathie.

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L' auteur

Martin Brunschwig

Martin Brunschwig est membre du comité de rédaction de Science et pseudo-sciences depuis 2007.

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