L’importance des constantes

Cet ouvrage nous plonge dans un monde étrange et fascinant, celui des constantes sur lesquelles reposent les théories physiques. Coécrit par un physicien théoricien au CNRS, Jean-Philippe Uzan, spécialiste de cosmologie, et par une ancienne journaliste scientifique, Bénédicte Leclercq, responsable des conférences au Palais de la découverte, l’ouvrage s’annonce donc comme conciliant plusieurs approches.

Les constantes sont d’abord définies en détail, avec une réflexion sur leur nature. Elles se présentent sous différentes classes. La masse d’une particule élémentaire, par exemple, est une propriété des objets physiques. Les constantes gravitationnelle ou électromagnétique concernent les phénomènes physiques. D’autres constantes de référence définissent notre Système international d’unités, comme la vitesse de la lumière ou la charge électrique élémentaire. De nombreuses autres constantes semblent plus exotiques, ne serait-ce que par leur nom, comme la permittivité ¹ du vide ou la constante de structure fine ².

Les auteurs se penchent ensuite sur l’élaboration des concepts, en soulignant que théorie et expérimentation sont reliées et progressent conjointement au fil de l’histoire. On retrouve alors l’omniprésence des constantes, autant dans la démarche de théorisation que dans l’art de la mesure. Elles sont donc intrinsèquement liées aux théories scientifiques. La découverte d’un nouveau phénomène s’accompagne d’ailleurs souvent de l’apparition d’une constante, voire de deux ! Par exemple, la constante de la gravitation a fait son apparition avec les lois de Newton. Mais une fois surgies, certaines sont parfois volages. En fonction de l’évolution des concepts, elles peuvent être remplacées par d’autres devenues alors plus attrayantes ou même s’évanouir, comme la constante de Joule aujourd’hui délaissée.

Les auteurs retracent ensuite certaines enquêtes menées pour savoir si ces fameuses constantes, généralement mesurées depuis un siècle ou deux, sont réellement « sincères » et restent fidèles à l’appui de nos édifices théoriques. Mais si l’on pouvait en soupçonner certaines de faire preuve de petites ou grandes inconstances, ils nous montrent comment cela pourrait ébranler l’édifice des théories actuelles.

Et si l’on modifiait leur valeur, juste un peu… que se passerait-il ? Les auteurs nous invitent à cet exercice stimulant et vertigineux. Par exemple, une vitesse de la lumière plus faible rendrait plus difficiles les échanges d’électrons entre les atomes. Les liaisons chimiques seraient rares ou moins fortes, la chimie et donc la biologie en seraient modifiées. De même, au sein des étoiles, les auteurs nous montrent qu’en prenant des valeurs très légèrement différentes pour certaines constantes, on ne retrouve plus le carbone ou l’oxygène nécessaires à la vie.

Concrètement, l’étude des météorites a permis de découvrir que la constante de structure fine n’aurait pas varié durant ces 4,5 derniers milliards d’années. Mais nous ne savons toujours pas si la constante gravitationnelle varie dans le temps. L’existence de la matière noire en dépend. Les chercheurs guettent donc le moindre écart, pour savoir comment réviser les lois de la physique. Voici donc un livre qui réunit beaucoup d’atouts pour fasciner les lecteurs amoureux des sciences et qui pourra aussi séduire les simples curieux, la délicieuse pointe d’humour des auteurs permettant d’aborder plus facilement ces sujets.

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