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Le cinéma de Rika

Publié en ligne le 28 juin 2004 - Médecines alternatives -

Les Anglo-américains les appellent des ghost writers, des « écrivains fantômes ». En France, on parle de nègres, un mot qui évoque l’esclavage et la ténèbre qui dissimule les traits de ces écrivains anonymes, chargés de donner sa forme définitive - quand ils ne le rédigent pas tout seuls - à un ouvrage qui paraîtra sous une autre signature que la leur. Lorsqu’ils traitent directement avec l’éditeur, le contrat leur vaut la désignation plus prestigieuse d’adaptateur.

Adaptateur à quoi ? En principe, aux goûts supposés du public que l’on vise, ou aux exigences d’un style plus correct. Cela peut aller d’une réécriture complète du texte jusqu’à de simples retouches, en passant par des changements dans l’ordonnance des éléments, des coupures ou des ajouts. Rien de condamnable dans cette pratique, pourvu que l’essentiel de la substance vienne de l’auteur nommé. Bien des gens peuvent avoir des choses intéressantes à dire et manquer du don de les communiquer. Des professionnels de l’écriture sont là pour les aider. Celui qui a été mis au service de l’aimable chanteuse connaît son métier. Dans sa mise au point du nouvel ouvrage de Rika - mes secrets naturels pour guérir et réussir - il reprend la technique qui avait assuré le succès du précédent, Ma médecine naturelle (voir Science et pseudo-sciences n° 160, avril 1968).

On commence par la note émotionnelle : un épisode de la vie de Rika. Dans Ma médecine naturelle, c’était le terrible accident de la route qui l’avait conduite aux portes de la mort, avec la crainte, si elle survivait, de rester incapable de reprendre sa carrière d’artiste. Le lecteur ainsi préparé est heureux d’apprendre comment un ami végétarien a enseigné à Rika les remèdes qui ont recalcifié ses vertèbres broyées : œuf cru au jus de citron, huile de pépins de courge, cocktail de jus de navet, de carotte et de chou, etc., etc. Le soir, un cataplasme d’argile glissé dans la coquille de plâtre qui enserrait son corps. Traitement appliqué par des mains complices à l’insu du personnel de la clinique, qui n’aurait pas toléré pareille imprudence (le moindre déplacement des vertèbres pouvant se solder par une paralysie irréversible) et poursuivait un traitement à base d’injections de calcium. Et Rika s’en est tirée, grâce à la « médecine naturelle », affirme-t-elle, les remèdes classiques n’y étant pour rien. Suit une succession de recettes recopiées dans les ouvrages « naturistes,) des boutiques de diététique : tisanes variées, en infusions ou en décoctions, argile à boire, à manger ou en cataplasmes, bains de siège froids chaque matin. Avec, de temps à autre, quelque sottise pseudo-scientifique. La Terre est chargée de « courants négatifs » qui entrent dans notre corps par les pieds, tandis que l’espace est parcouru de « courants positifs « qui pénètrent dans nos têtes. L’argile contient toute l’intelligence de la nature. La vie ne réside pas dans le monde animal, mais seulement dans les végétaux, lesquels ne recèlent jamais de substances toxiques. Etc., etc.

Ce salmigondis a fait un gros succès de librairie, amplifié par la radio et la télé qui, pour ramasser les miettes, volent au secours de la victoire. Avec les droits d’auteur, Rika monte une entreprise d’herboristerie en gros. Pourquoi ne pas répéter une si belle opération ? s’est dit un autre éditeur. C’est ainsi que vient de sortir le second Rika Zaraï, dans une présentation rappelant de près celle du premier. L’introduction émouvante, cette fois, nous ramène au temps où Rika faisait ses débuts en France dans un cabaret de Pigalle. Une histoire à tirer des larmes des yeux les plus secs. Et qu’on n’a pas de raison de ne pas croire authentique, même si l’adaptateur a su l’enjoliver.

Dans son premier livre Rika nous apprenait comment guérir, même dans les cas désespérés,. Cette fois aux recettes de santé s’ajoutent celles de la réussite sentimentale et sociale. Elles procèdent d’ailleurs du même principe : revenir à la nature, libérer les forces extraordinaires que chacun possède à l’intérieur de soi. Ces forces, qui sommeillent dans notre subconscient, Rika nous affirme qu’elle a appris à s’en servir et nous invite à faire comme elle. Rien de plus simple : « L’erreur de la plupart d’entre nous consiste à privilégier la volonté du cerveau rationnel, logique, et à se garder des désirs nés dans le cerveau intuitif, siège du subconscient. « Or c’est le subconscient qui nous fait agir et qui gouverne notre corps. Il est le gardien de la santé, le moteur de la réussite sociale. Nous devons donc l’apprivoiser, en faire notre allié. Pour cela, usons du rêve éveillé, du cinéma mental « Les images mentales positives suggèrent à l’inconscient tout ce que nous désirons dans la vie : santé, bonheur, argent, etc. Il se charge de les obtenir. Fabriquez-vous des films, passez-les dans votre tête, voyez-vous vivre vos rêves. Par votre intermédiaire, vos désirs glisseront dans votre subconscient. Vous aurez l’heureuse surprise de les voir se réaliser. Et tant pis pour ceux qui ricanent ! »

Le recours à l’autosuggestion comme panacée avait déjà fait au début de ce siècle la célébrité du pharmacien-psychothérapeute Émile Coué. Rika - ou son adaptateur - ne renient pas ce prédécesseur, dont ils citent le nom. Ce qui n’est pas mal pour un livre qui promet des « secrets ». Mais Il l’y a pas de quoi rikaner, en effet. Car cette glorification du fantasme, cet abandon du rationnel éveillent de curieuses résonances en notre temps de déchirement social et de détresses. Le cinéma mental, nous le devinons dans les yeux des pauvres gens qui font la queue devant les bureaux du tiercé ou du tapis vert.

Rika, on s’en doute, va chercher ailleurs ses exemples. Un couple de médecins a fondé au Texas un centre d’accueil pour cancéreux en stade terminal. Trois fois par jour ceux-ci sont invités à pratiquer une séance de cinéma mental. Le premier patient traité par cette méthode, un sexagénaire atteint d’une tumeur à la gorge, ne pesait plus que 45 kg quand on commença ce traitement sans pour autant cesser la radiothérapie. On ne lui donnait pas plus de 5 % de chances de survie. On lui apprit tout d’abord à « visualiser » des situations où il apparaissait guéri et heureux. « Ensuite, il imaginait le plus précisément possible l’offensive de ses globules blancs contre ses cellules cancéreuses ; l’attaque, leur destruction et leur évacuation du corps. À chaque nouvelle séance, il devait se convaincre que sa tumeur avait diminué de volume et qu’il était sur la voie de la guérison. « Très vite, assure Rika (qui a trouvé cette histoire dans un livre publié par le médecin en question) le malade retrouva l’appétit et reprit du poids. » Deux mois plus tard, plus aucune trace de cancer. Il était complètement guéri ! « Et ce n’est pas tout. Enthousiasmé par le cinéma mental, le miraculé décide de guérir de la même manière une arthrite dont il souffrait depuis des années. « Il utilisa les images mentales appropriées. Le plus souvent possible, il voyait ses globules blancs polissant énergiquement les articulations de ses jambes et de ses bras. Et celles-ci devenaient de plus en plus lisses, brillantes et souples. » Quelques semaines plus tard, l’heureux homme retourne à son sport favori, délaissé depuis longtemps : la pêche à la truite. Et ce n’est pas tout encore. Depuis vingt ans il souffrait d’impuissance sexuelle. La même méthode lui donne des résultats spectaculaires. Rika ne nous dit pas quelles images mentales ont été utilisées dans ce cas.
Les défaillances viriles la préoccupent beaucoup. Elles ont droit à tout un dossier dans la partie « Conseils », qui occupe plus des trois quarts de l’ouvrage, mêlant des notions banales à d’autres parfaitement fantaisistes, le tout entrelardé de recettes piquées dans la littérature naturiste et dont un grand nombre figuraient déjà dans son précédent ouvrage. Contre l’impuissance on apprend comment préparer, entre autres, le « velouté d’amour », la « tisane spéciale tonus sexuel » et les « cocktails savoureux stimulation glandulaire ». Pour ces derniers, il faut une gousse entière d’ail ; on ne dit pas s’il convient aussi de chercher une partenaire à l’odorat pas trop délicat. Ne pas oublier les exercices physiques : réflexo-massage du pied, selon la méthode du docteur Soleil, pour qui notre corps « est reproduit, en miniature, sur nos pieds et nos deux voûtes plantaires. Le point “testicule” se trouve sous l’os de la cheville, le point “hypophyse” sous le gros orteil »
Rappelons que le réflexo-massage du pied a deux concurrents dont Rika ne dit mot mais dont nous avons déjà entretenu nos lecteurs : l’iridologie, pour qui les parties de notre corps ont une projection dans l’iris, et l’auriculothérapie, qui préfère les voir dans le pavillon de l’oreille, lové comme l’embryon humain. Devons-nous chercher notre modèle réduit dans nos pieds, dans nos yeux ou dans nos oreilles ? Souhaitons que les spécialistes se mettent d’accord pour trancher cette cruelle incertitude.

Comme tous ceux qui exploitent le filon des « médecines douces », Rika associe un vocabulaire scientifique mal digéré à des lieux communs d’une grande banalité, qu’elle présente sur un ton péremptoire comme sa découverte personnelle. Ex. : « Je l’ai dit : notre santé est notre bien le plus précieux. » Le tout assorti d’un remake des « théories » de son premier livre, enrichies et enjolivées. « Les ondes venues de l’espace sont appelées ondes cosmiques... les ondes terrestres sont appelées ondes telluriques. » On en apprend des choses ! Poursuivons : « Les ondes cosmiques sont chargées d’électricité positive et se dépiacent à la vitesse de 300 000 km par seconde. Pour équilibrer ces rayonnements cosmiques qui nous arrivent par la tête, la terre nous envoie ses propres rayonnements qui nous pénètrent par les pieds... ces ondes sont chargées d’électricité négative... L’équilibre énergétique entre ces deux forces - cosmique et tellurique - nous permet d’être en pleine forme. »

Quel condensé de sottises ! Il serait fastidieux de tout éplucher. L’espace interstellaire est parcouru par des particules matérielles à très haute énergie : protons, ions divers, électrons (ceux-ci chargés négativement). On ne parle pas d’ondes, comme le fait Rika, qui confond évidemment le rayonnement cosmique avec le rayonnement électromagnétique (qui comprend les ondes de la lumière). Ce rayonnement cosmique primaire nous arrive de toutes les directions. Tel quel, il n’atteint le sol terrestre qu’en très faible proportion : à peine 1 %. Les autres particules - soit 99 % - heurtent les atomes de l’atmosphère. Ils leurs arrachent des électrons ou même brisent des noyaux. Il en résulte des gerbes de rayonnement secondaire, dont les abondantes particules se partagent l’énergie portée par les particules du rayonnement cosmique proprement dit. Primaire ou secondaire, le rayonnement cosmique n’évoque pas cette pluie verticale que suggère notre ignorante. Il arrive de tous côtés et s’il touche notre corps, il ne choisit pas spécialement la tête. S’il peut constituer un problème pour les cosmonautes, il n’exerce pas sur nous d’effets physiologiques mesurables. Quant au rayonnement tellurique qui équilibrerait le rayonnement cosmique, il n’existe que dans l’imagination des faiseurs de systèmes fantaisistes. La terre réfléchit un peu de la lumière qu’elle reçoit, elle rayonne de l’énergie thermique, quelques produits de la radioactivité des roches de surface, pas d’« ondes chargées d’électricité négative ».

Il faut rendre cette justice à Rika Zaraï qu’elle ne prétend pas à l’originalité. Sur la couverture de son précédent chef d’œuvre on pouvait lire : « Je n’ai pas inventé les merveilleux principes évoqués dans cet ouvrage. Telle une abeille laborieuse, j’ai choisi et butiné les fleurs de la connaissance pour en extraire le plus beau nectar et vous l’offrir. » Pour mieux choisir ses fleurs l’abeille devrait s’inscrire aux cours du soir, en attendant l’université du troisième âge. Les fans de « médecines naturelles » avaient du éprouver à la lecture de son premier livre une impression de déjà vu. Cette fois le nectar risque d’avoir un goût de rance, bien qu’aux problèmes de santé il en ajoute quelques autres, avec pour solution le merveilleux « cinéma mental ».

Un « bon moral » accroît les chances de guérison ; on le sait depuis longtemps. À cette vérité empirique, Rika ajoute une référence aux recherches récentes qui tendent à mettre en évidence l’action du cerveau sur le système immunitaire. Ainsi pense-t-elle se donner une caution de scientificité. Mais à quel point sa description des causes de la maladie et des facteurs de guérison s’éloigne de toute réalité, il nous suffira, pour en juger, de quelques exemples. « Nos cellules, explique-t-elle, produisent l’électricité dont l’organisme a besoin pour vivre. Pour cela, il leur faut trouver de l’énergie... une de leurs principales sources sont les ondes électromagnétiques de la terre et du ciel. “Mais attention !” Cette énergie doit être en harmonie avec celle de notre organisme. » Une insuffisance du rayonnement terrestre, une « mauvaise nature » du rayonnement rompent l’harmonie. Car il existe deux sortes d’énergie, la bonne et la mauvaise. C’est pourquoi l’électricité artificielle est nocive, tandis que l’électricité naturelle est salutaire. « Si elles (les cellules) ne peuvent s’approvisionner (par les aliments ou l’air ambiant) en une quantité suffisante de haute énergie, le risque de cancer, puis de perturbations, apparaît. » Heureusement, le foie et la rate collectent les ondes, les trient, et envoient les mauvaises aux reins, qui les évacuent. D’où le pipi au lit. (Je n’invente rien. Si vous doutez de ma parole, ouvrez furtivement l’ouvrage dans une librairie, à la page 89. Ne l’achetez que si vous avez vraiment de l’argent à perdre. Car ce n’est pas drôle, et même franchement ennuyeux, à force de répétitions, d’incohérences et de contradictions.)

Pour aider l’organisme à sélectionner les bonnes ondes, il faut bien entendu pratiquer toutes les recettes de vie « naturelle » déjà mentionnées (tisanes, jus d’algues, bains de siège froids, etc.) et, si vous êtes malade, des séances de cinéma mental. Ne confondons pas celui-ci avec le banal « bon moral », lequel peut vouloir au contraire qu’on ne s’hypnotise pas sur sa santé et qu’on pense à autre chose. Le cinéma mental est une pratique proche de la sorcellerie. « Visualisez » une scène imaginaire, elle deviendra réelle. Et repassez souvent le film. Cela ne vaut pas seulement pour la santé. Le cinéma mental vous permettra de faire le voyage qui vous tente, de construire la maison de vos rêves, d’obtenir l’augmentation que vous souhaitez, de réussir à votre examen, de conquérir le cœur de la personne que vous voulez séduire (pas de limite d’âge). Aucun effort de volonté n’est demandé. Le subconscient, « ce géant qui sommeille, en nous », se charge de tout.

À côté du cinéma mental, il y a les « petites phrases » qu’il faut se répéter, le matin au réveil, le soir avant de s’endormir, pendant trois minutes au moins, jusqu’à dix minutes si on peut, et dans la journée de temps en temps. Un peu comme les invocations que les membres d’une secte orientale psalmodient inlassablement. En voici des échantillons. Pour guérir : Je déborde de santé. Désormais je suis plein(e) de force. Chaque jour mon cœur (ou mes reins, ma jambe...) va mieux. Pour rajeunir : Mon corps (ou : mon visage) devient de plus en plus beau (ou : jeune). Je suis jeune, je suis énergique. J’ai la jeunesse, rien ne me résiste. Pour maigrir : Je maigris chaque jour davantage. Mon corps est mince, ma taille est fine. Pour effacer un manque d’assurance et réussir. J’ai de la valeur, tout le monde m’apprécie. Je réussis en tout, j’ai du talent. Je suis doué, j’ai du succès. Pour apprendre à aimer son corps. Mon corps est apte à l’amour. Mon corps est unique au monde.

J’ai naguère tenté d’explorer les mécanismes qui assurent la réussite commerciale de Rika ; je n’y reviendrai pas (1). Le public s’est-il un peu lassé ? Une enquête du Quotidien de Paris fait état d’une baisse relative de 22 % dans les premières ventes du nouvel ouvrage. Mais comme la radio et la télé « marchent » au moins aussi bien que la première fois, il n’est pas douteux que des millions de Françaises et de Français voudront connaître les secrets naturels pour réussir et guérir et que nombre d’entre eux prendront pour argent comptant cette monnaie de singe. S’il ne s’agissait que de balivernes style cinéma mental il n’y aurait qu’à souhaiter bien du plaisir aux amateurs. Encore que pour un mal comme le cancer, tout battage autour de thérapeutiques illusoires risque d’accroître le nombre des gens qui (souvent par appréhension du diagnostic) retardent le moment de consulter un vrai médecin. Mais cette fois il y va d’un fléau nouveau et (en l’état actuel des connaissances) plus menaçant : le Sida, auquel Rika consacre une vingtaine de pages bourrées de désinformation et d’effarantes contrevérités.

Cela commence dès les premières lignes, dans lesquelles Rika accuse le corps médical français d’avoir eu « des réactions affolées » devant la propagation du Sida et d’avoir semé la panique en répandant des chiffres alarmistes. À l’appui de cette surprenante affirmation (car il semble que comme il arrive souvent devant un péril nouveau, la prise de conscience ait plutôt été tardive) elle note que fin août 1988, on avait recensé en France 4 200 cas, 4 200 cas de trop, certes, mais un chiffre objectivement limité, qui n’explique pas à lui seul l’alarmiste ambiant. Or, dit-elle, le cancer et les maladies cardio-vasculaires font bien plus de victimes. La comparaison ne tient pas debout. La mortalité par cancer ou maladies cardio-vasculaires ne varie pas beaucoup d’une année sur l’autre et la médecine sait combattre ces maux. Contre le Sida elle est encore à peu près désarmée ; d’une année sur l’autre le nombre des décès augmente exponentiellement sans qu’on ait encore trouvé d’autre moyen de ralentir cette explosion que la prévention. Feindre d’ignorer cette différence, c’est ou bien être stupide, ou bien tromper. sciemment son monde.

Autre truquage éhonté. Rika cite le Dr Mahler, directeur général de l’Organisation Mondiale de la Santé. « Il estime » écrit-elle « (estimation qu’il qualifie de large) qu’on peut craindre dans l’avenir une centaine de cas avérés de sida dans le monde entier. Il se déclare beaucoup plus préoccupé par la poliomyélite, la rougeoie ou le tétanos, qui tuent 5 millions de personnes par an dans le Tiers Monde. Mais cette mise au point n’a pas calmé l’inquiétude du monde scientifique... » Rika oublie de dire à quelle époque le Dr Mahler a fait cette déclaration. C’est bien dommage. Car dès le mois d’octobre 1986, à New York, le Dr Mahler plaidait coupable en reconnaissant que l’OMS n’avait pas perçu aussi rapidement qu’elle aurait pu le faire les dimensions globales de l’épidémie de Sida. Depuis lors, l’OMS a développé une stratégie générale contre le Sida. Elle a mis le problème à l’ordre du jour de deux de ses assemblées générales et décidé de parrainer la « journée mondiale » contre le Sida, qui a eu lieu le 1er décembre. Ces faits étaient connus avant la sortie du dernier livre de Rika, de même que le remplacement, en juillet du Dr Mahler par M. Hiroki Nakajima à la direction générale de l’OMS. Un simple souci de précision dans l’information aurait dû inciter Rika - ou son « adaptateur » - à mentionner le nom de l’actuel directeur de l’OMS en donnant à son prédécesseur, comme il est d’usage, son titre d’« ancien directeur ». Ils avaient matériellement le temps de le faire, puisqu’à quelques lignes de distance ils font état des statistiques publiées fin août, c’est à dire après l’élection du nouveau directeur général. Négligence, ou souci de garder une apparence d’actualité à des appréciations rassurantes déjà anciennes, qui sont démenties par les faits et abandonnées par leur auteur ? C’est un peu ce qu’on appelle un mensonge par omission.

Rappelons que les chiffres cités dans les statistiques et les prévisions distinguent les patients souffrant du Sida des personnes séropositives, dont le sang contient des anticorps révélant la contamination par le virus, mais qui ne présentent pas (ou pas encore...) les symptômes d’apparition de la maladie. Dans son bulletin de novembre, l’OMS confirme ses précédentes estimations, selon lesquelles en 1987 le nombre total des séropositifs dans le monde devait être compris entre 5 et 10 millions. Partant de ces donnés, le directeur général de l’OMS, dans une interview accordée au Monde (1.12.88) prévoit que le nombre total des malades dépassera le million en 1991, étant entendu que cette estimation ne prend pas en compte les nouvelles infections survenues soit cette année, soit plus tard. Un autre chiffre mesure la gravité de la situation : d’ici le début de la prochaine décennie, un demi-million de nouveau-nés souffriront d’un Sida transmis par leur mère ; à moins d’une découverte dans les moyens thérapeutiques, la majorité d’entre eux ne dépassera pas l’âge de cinq ans.

La journée du 1er décembre a sonné le rassemblement de tous les efforts entrepris pour tenter de barrer la route au fléau. Les laboratoires se mobilisent pour découvrir un médicament et/ou un vaccin efficaces. Parallèlement on intensifie l’information du public, afin de généraliser l’emploi des préservatifs et, chez les toxicomanes, de seringues jetables après un seul usage.

De tout cela, Rika se fiche comme de son premier bain de siège. Pas un mot sur les processus de contamination, y compris le plus tragique, celui qui transmet le virus du sang de la mère au sang de son bébé. Le mot « préservatif » n’apparaît pas une seule fois. Guérir les séropositifs et les malades ? Rien de plus simple. Si l’on n’y arrive pas, c’est la faute aux chercheurs, à qui notre chanteuse fait la leçon. Ils s’obstinent à trouver un moyen de tuer le virus « alors qu’un organisme en bonne santé le fait sans aucune difficulté. » Ils perdent leur temps en cherchant un vaccin qui « risque de ne jamais voir le jour » Pauvres ignares ! Que n’écoutent-ils Rika quand elle leur explique qu’il s’agit seulement de renforcer l’immunité naturelle par des moyens aussi évidents que l’argile, les infusions de buis, les pensées positives, le cinéma mental. Sur l’immunité, Rika a ses vues personnelles. Elle confond tout simplement anticorps et vaccins. Elle ne paraît pas savoir que le vaccin est un élément de l’agent responsable de la maladie, que l’on introduit à titre préventif dans un organisme sain afin d’y déclencher la formation d’anticorps spécifiques. Elle en arrive à écrire que « les anticorps qui se trouvent dans le sang des séropositifs se révèlent un excellent vaccin contre la maladie ». Affirmation en soi dépourvue de sens, puisqu’un anticorps n’est pas un vaccin. Ce dernier porte un antigène, c’est à dire une protéine étrangère à l’organisme et qui, introduite dans celui-ci, détermine la synthèse d’anticorps. Par malheur, les anticorps produits dans l’organisme infecté par le virus du Sida n’ont pas l’efficacité nécessaire pour débarrasser l’organisme de ce virus. Et ce dernier sait paralyser l’immunité naturelle. Ce phénomène a été récemment exposé de façon très claire, même pour le lecteur peu averti, dans une étude du professeur Norbert Gualde, responsable du laboratoire d’immunologie de la faculté de médecine de Limoges, publiée par la revue Raison Présente (n’85, 1er trimestre 1988). Ce qui nous a donné l’idée de demander à ce spécialiste de bien vouloir lire le chapitre que Rika consacre au Sida, et de nous dire ce qu’il en pense. Qu’il soit remercié d’avoir accepté la corvée de cette lecture. Nous reproduisons plus loin la lettre dans laquelle il nous communique sa réaction.

Revenons aux dangereuses divagations de Rika sur la séropositivité et l’immunité. « La supposition qu’un séropositif est un malade en puissance et qu’il peut contaminer autrui repose sur le fait que son sang contient des anticorps du virus du sida. Mais cela reste une supposition qui ne fait pas l’unanimité dans le corps médical. » Premièrement : si un séropositif peut contaminer autrui, ce n’est pas par les anticorps, c’est par les virus dont il est porteur et dont la présence est dénoncée par celle des anticorps. Qu’un séropositif puisse contaminer autrui n’est malheureusement pas une « supposition », c’est une certitude. S’il en allait autrement, il n’y aurait pas d’épidémie. Il est grave, et même criminel, de mettre la contagiosité en doute. C’est inciter les séropositifs à ne pas prendre les précautions nécessaires pour éviter la contagion. Rika va jusqu’à prétendre que les séropositifs sont « des sujets immunisés contre le sida et non pas des malades en puissance ». Ce propos scandaleux s’appuie sur une communication parue dans la revue médicale britannique The Lancet dans son numéro du 17 septembre dernier. Voici d’abord ce qu’elle en dit :
« Le 17 septembre 1988, le Lancet, un journal médical des plus célèbres au monde, rapporte que des rémissions importantes, longues déjà de deux mois, ont été obtenues sur des malades atteints de sida, grâce à l’administration d’un sérum fabriqué avec... le sang des séropositifs ! Parallèlement, ces mêmes bons résultats étaient obtenus par les chercheurs du London Hospital Medical College, et par ceux de l’université d’Illinois, de Chicago. »

Quiconque parcourt ces lignes comprend qu’au moment où la communication a été publiée, les malades bénéficiaient de rémissions déjà anciennes de deux mois, et que deux autres expériences analogues, menées indépendamment, ont donné les mêmes résultats. Mais prenons le texte du Lancet, que j’ai sous les yeux. On y apprend d’abord qu’il s’agit en fait d’une seule et même expérimentation, menée et signée conjointement par des chercheurs de Londres et de Chicago. On apprend aussi que sur les six malades traités, deux sont morts de complications pulmonaires, l’un neuf semaines, l’autre douze semaines après l’administration d’anticorps de séropositifs. (Il s’agissait dans ces cas de ce qu’on appelle des infections « opportunistes », c’est-à-dire causées par des agents pathogènes qui, rencontrant un organisme dont l’immunité est affaiblie, profitent de l’occasion). Deux autres patients ont succombé, l’un après cinq mois, l’autre huit mois, sous l’action directe du Sida. En sorte que lorsque la communication a été donnée au Lancet, il ne restait que deux survivants sur les six patients participant à l’expérimentation. Rika gomme effrontément ce léger détail ; son expression « des rémissions déjà longues de deux mois » est calculée pour donner au lecteur l’impression que « tout va bien ».

Cela dit, empressons-nous de souligner que cette expérimentation n’est en aucune façon un échec. Elle apporte une contribution importante à l’ensemble des recherches qui se poursuivent pour trouver une arme contre le fléau. Mais là encore, le lecteur de Rika est condamné à ne rien comprendre. « A priori » écrit-elle « on pourrait se poser la question de savoir s’il n’était pas dangereux d’administrer à des sidéens un sérum fabriqué à partir du sang des séropositifs. Les expériences mentionnées plus haut ont prouvé le contraire. » Suit le passage déjà cité où Rika prouve sa totale ignorance en confondant anticorps et vaccins.

Le problème que se posaient les auteurs de l’expérimentation n’avait rien à voir avec ce que raconte Rika. Le plasma qu’ils administraient à leur patient était d’ailleurs stérilisé par chauffage prolongé ; il ne pouvait contenir de virus vivant. L’objectif visé est clairement expliqué dans leur introduction. Résumons-en l’essentiel. Le sang des séropositifs contient des anticorps dont l’un s’attaque à un antigène viral appelé le p24. L’apparition du Sida chez un séropositif coïncide avec une diminution (tendant vers la disparition) du taux d’anticorps anti-p24 dans le sang et à une montée des antigènes. Ce qu’on voulait savoir, c’est si en administrant à des sidéens des anticorps anti-p24 prélevés sur des séropositifs, on observerait une amélioration de leur état. Ce qui se produisit en effet, de façon transitoire.

Soulignons-le encore : un tel traitement est une sérothérapie, pas une vaccination (laquelle s’applique du reste à des individus sains, pas à des malades, prenons l’exemple d’une maladie bien connue ; le tétanos. Le vaccin antitétanique est une toxine traitée pour être rendue inoffensive. Elle garde cependant le pouvoir, de déclencher la production par le système immunitaire d’anticorps anti-tétanos. En un temps assez court il s’établit ainsi une immunité active de longue durée, renouvelable par des injections de rappel. C’est la vaccination. Chez un sujet porteur d’une blessure suspecte, il faut aller plus vite : on commence par injecter du sérum prélevé sur des organismes déjà vaccinés. Cette immunité passive, qui ne met pas en action le système immunitaire du récepteur, ne dure qu’une dizaine de jours.

Sous l’intertitre vicieusement ambigu Nous sommes tous des séropositifs, Rika commence par rappeler que les convalescents d’infections virales comme la rubéole, les oreillons, la rougeole, la variole sont définitivement immunisés : « Nous ne pouvons plus contracter une de ces maladies. Notre sang est séropositif de ces virus, c’est à dire qu’il contient leurs anticorps. » Ce dont elle s’autorise pour avancer la plus effrayante de ses ricaneries : « De même, être séropositif du sida ne veut pas dire forcément qu’on héberge encore le virus ni qu’on est un malade en puissance. Comme dans les maladies les plus courantes, le virus a pu disparaître et ne laisser dans le sang que les anticorps... ce qui prouverait au contraire comme on va voir, que les séropositifs sont immunisés contre cette maladie. » Après quoi vient l’astucieux détournement du texte publié dans le Lancet.

Entre les infections virales mentionnées plus haut et le Sida, existe malheureusement une différence capitale, qui fait toute la gravité du Sida : c’est que le virus VIH s’attaque au système immunitaire lui-même.

On remarquera que la dernière phrase citée est faite de tournures hypothétiques appuyées sur d’autres hypothèses, avec des références aussi peu autorisées qu’un cas de guérison rapporté dans l’hebdomadaire américain Sunday Times et confirmées... par les autorités municipales de Los Angeles. Ce que - malheureusement encore les médecins observent tous les jours, c’est que le Sida se déclare chez des séropositifs, porteurs, parfois depuis plusieurs années, d’anticorps qui ont fini par être débordés par le virus. Telle est la vraie nature du drame qui dans tous les pays mobilise les chercheurs et incite les responsables gouvernementaux à développer les campagnes en faveur de la prévention. Même s’il n’atteint pas tout à fait le tirage du précédent, le nouveau livre signé par la chanteuse touchera des millions de lecteurs. Combien, parmi eux, de séropositifs qui prendront prétexte de ce livre pour ne pas user de préservatifs Combien de futurs malades ?

L’eau à la bouche, les producteurs des chaînes de radio et de télé se sont jetés sur le second livre de Rika, comptant bien retrouver les taux d’écoute que leur avait apportés le premier. N’avait-on pas vu jusqu’à un professeur éminent et Mme le ministre des affaires sociales échanger des coquetteries devant les caméras avec la prophétesse des « médecines naturelles » ? Cette fois pourtant les choses se sont gâtées. Des médecins qui mènent le combat contre le Sida ont dénoncé la malfaisance du nouvel ouvrage. Le professeur Claude Got, auteur d’un rapport sur le Sida remis au ministre de la santé, parle de « propos dangereux ». Le président du conseil national de l’Ordre des médecins, Louis René, les estime « extrêmement préoccupants pour la santé publique »... et suggère au ministre de la santé de demander l’avis de l’académie nationale de médecine. Comme si on ne pouvait s’en douter d’avance ! C’est ce qu’un proverbe américain appelle repasser au voisin la pomme de terre qui brûle les doigts. Quant au docteur Jérôme Cahuzac, conseiller technique du ministère de la santé, il déclare : « Nous sommes consternés. Ce livre risque d’avoir d’épouvantables effets négatifs. Mais que pouvons nous faire ? Il n’est pas dans notre pouvoir de retirer un livre du marché. Sauf s’il se trouve un motif dans l’arsenal juridique. Mais le délit de sottise n’existe pas... »

On éprouve un sentiment de malaise devant cette carence. N’y aurait-il qu’à se croiser les bras en versant des larmes sur le sort des milliers de victimes que risque de faire un livre meurtrier ? Avant de dire publiquement qu’il n’y a rien à faire, n’eut-il pas été opportun d’étudier le problème avec des juristes. Et, s’il le faut, envisager une législation donnant les armes nécessaires pour faire face au péril ?

Le problème du charlatanisme pseudo-médical déborde le cas de Mme Zarai. Pour qui connaît les dessous des opérations médiatiques elle n’est même pas la principale responsable de l’affaire. Son prodigieux mélange d’ignorance et de suffisance le montre assez. On pourrait trouver un thème de réflexion dans l’aventure de cette plaisante chanteuse qui, grièvement blessée dans un accident de la route et sauvée de justesse, s’imagine qu’elle le doit non aux soins des chirurgiens mais aux compresses d’argile qu’un professionnel des « médecines douces » lui apporte en cachette et, rétablie, raconte son histoire à un éditeur qui flaire la bonne affaire. Informateur(s) et adaptateur(s) aidant, on met au point le mythe Rika Zaraï : deux millions huit cent mille exemplaires pour un livre qui, après un court récit autobiographique, n’apporte qu’une compilation de recettes végétariennes et naturistes qui traînent dans les librairies. Pour que ça marche, il faut que Rika elle-même croie au mythe, qu’elle se persuade que « c’est arrivé ». Elle entre dans son rôle. Elle donne même des consultations par téléphone. Et comme elle a le sens du business, elle utilise sa fraîche notoriété pour une entreprise d’herboristerie dont les produits ne sont pas donnés (voir Science et pseudo-sciences no 166). Ça doit rapporter mieux que les chansons. Un nouvel éditeur, Lattès, rachète au premier le droit de reprendre l’exploitation du mythe. Et comme il faut bien du nouveau, il n’y va pas par quatre chemins. Ce n’est plus seulement le cancer que guérissent les tisanes, c’est aussi le Sida. Dont selon Rika, on exagère le danger. Dans les studios de l’audiovisuel, la vedette a gagné en arrogance. Sur France-Inter, comme une auditrice s’inquiète de savoir si certaines recettes « naturelles » ne sont pas fantaisistes, Rika répond avec hauteur « Je ne vous permets pas ! » Et l’animateur de l’émission coupe complaisamment la parole à l’auditrice. À une autre qui évoque les droits d’auteur qu’elle a touchés pour son premier livre et qu’elle a investis dans sa fabrique de tisanes, Rika rétorque que cet investissement lui a valu des dettes (la pauvre !) et qu’elle a créé des emplois. Sur la « 5 », où elle est confrontée avec le docteur Aulas, elle commence par se plaindre d’un « déchaînement de haine et d’agressivité » dont elle serait la victime. Quant aux éditions Lattès, leur directeur général, questionné par le Figaro (6.12.88), il déclare (candeur ou cynisme ?) : « Rika Zaraï a un très vaste public que l’on ne peut ignorer. C’est pour cette raison que nous avions accepté d’éditer son livre » Il ne voit dans l’ouvrage « aucune matière dangereuse ».

Les éditions Lattès plaident donc non coupable ; elles estiment n’avoir pris « aucune espèce de responsabilité » vis à vis de la campagne de salut public engagée contre le Sida. Le fric avant tout. Les médecins qui sont atterrés par ce qu’ils ont lu en jugeront peut-être autrement. Nous les engageons - s’ils n’ont pas songé à le faire à jeter un coup d’œil sur les annexes insérées à la fin du volume, sous le titre Informations médecine naturelle. Ils y verront notamment un répertoire d’associations recommandées aux lecteurs de Rika. Quelques-unes prêtent à sourire, comme celle qui se donne pour objet « l’utilisation rationnelle des ondes radio-électriques ». Ou encore l’association « pour la défense des consommateurs des plantes médicinales » : on ne les savait pas menacés, sinon par quelques recettes de tisanes rikaïennes, comme la décoction de feuilles de buis, qui aurait fait envie à la marquise de Brinvilliers. La chose devient plus sérieuse avec la « Ligue nationale pour la liberté des vaccinations », dont le programme, s’il avait été mis en application, aurait empêché l’éradication totale de la variole et la quasi-extinction de la poliomyélite, pour ne citer que ces deux exemples. Ou avec le GNOMA - « Association de praticiens de thérapeutiques naturelles, guérisseurs, magnétiseurs » - autrement dit d’exercice illégal de la médecine.

Lors de l’émission de la « 5 », Rika fut présentée comme « le fer de lance de la médecine naturelle ». Telle est, comme on sait, l’étiquette arborée par les charlatans et les fadas dont les activités sapent la médecine dans notre pays (et ailleurs). Le ministre de la santé déclare ne pouvoir rien faire. S’il commençait par appliquer la législation existante ? Et si les chaînes audio-visuelles nationales diffusaient des reportages et des programmes de démystification, au lieu de prendre trop souvent leur part dans l’abêtissement du public et la plongée vers l’infraculture ?

Le premier livre de Rika n’avait guère ému les milieux médicaux. Le professeur J.P. Bader fut un des rares à réagir, par un article (que nous avons reproduit) intitulé J’irai chanter sur vos tombes. Qu’on me permette de citer la conclusion que, pour notre part, nous donnions à notre commentaire : « Face au péril des pseudo-sciences symptôme entre autres de l’angoisse de notre temps - la meilleure voie à suivre n’est d’ailleurs pas celle de la censure ou de la répression. Elle est dans l’éducation patiente du public, dans son initiation permanente à ce qu’est la science. Ainsi lui sera-t-il moins facile de croire qu’une championne du show business (et du business tout court) puisse lui apporter des miracles en matière de santé. Quand le moteur de votre voiture ne tourne pas rond, vous n’allez pas consulter un thaumaturge, mais un mécanicien. Il est vrai qu’il y a de bons et de moins bons mécaniciens. Mais ceci est une autre histoire. »

À l’époque il s’agissait surtout du cancer, terrain sur lequel Rika, ou ceux qui s’abritent derrière son nom, ne sont de toute manière pas les seuls marchands d’illusions. À présent c’est le Sida. L’affaire est plus grave, et l’on pourrait réviser quelques termes de notre ancienne conclusion. Ceux parmi les « bons mécaniciens » qui seraient tentés de se cantonner dans un silence frileux devant les prétendues médecines parallèles ne voient-ils pas les clignotants au rouge ?

Publié dans le n° 176 de la revue


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L' auteur

Michel Rouzé

Michel Rouzé, de son véritable nom Miecsejslaw Kokoczynski, est né à Paris en 1910 et décédé en 2004. Journaliste, (...)

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