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Le point sur le trou dans la couche d’ozone

Publié en ligne le 25 janvier 2021 - Climat -

La couche d’ozone agit comme un bouclier qui protège la vie sur terre des rayons ultraviolets nocifs. Les concentrations en ozone sont surveillées en continu depuis le Protocole de Montréal signé en 1987. Ce traité international réglemente la production des halocarbures (CFC, HCFC et HFC), des molécules de synthèse qui contiennent du chlore et du brome. Ils sont à l’origine de la destruction de l’ozone dans la stratosphère, c’est-à-dire la partie de l’atmosphère qui s’étend environ de 10 à 50 km d’altitude. Comme ces composés persistent dans l’atmosphère durant plusieurs dizaines d’années, il faudra donc plusieurs décennies avant que leurs concentrations retrouvent le niveau d’avant 1980. En Antarctique, le « trou » dans la couche d’ozone (qui correspond à une destruction de plus de la moitié du contenu total d’ozone en septembre-octobre) est un phénomène récurrent 1 en raison des températures extrêmement basses dans la stratosphère chaque hiver.

La destruction de l’ozone stratosphérique se produit dans les régions polaires lorsque les températures descendent en dessous de -80 °C dans le vortex polaire. À ces températures, des nuages (les nuages stratosphériques polaires) se forment dans la basse stratosphère et des réactions chimiques transforment des composés issus des halocarbures – inoffensifs vis-à-vis de l’ozone –, en composés actifs. Ces processus conduisent à une destruction rapide de l’ozone au retour de la lumière solaire au printemps (en septembre en Antarctique) au-dessus du pôle.

Les chercheurs disposent d’observations par satellite, par exemple celles des trois instruments IASI (pour Interféromètre Atmosphérique de Sondage Infrarouge), pour surveiller l’ozone au jour le jour (Figure 1). En septembre-octobre 2020, le vortex stratosphérique en Antarctique a été très stable. La première quinzaine de septembre est en général la période durant laquelle la destruction de l’ozone est la plus forte. Et elle peut se poursuivre tant qu’il fait assez froid, souvent jusqu’en octobre. Certaines années, les conditions météorologiques et dynamiques font que la superficie et l’amplitude du trou dans la couche d’ozone est plus importante.

Fig. 1 Superficie du trou dans la couche d’ozone observé par l’instrument IASI en automne 2020. À gauche les lignes en grisé représentent les années 2008 à 2020. On voit bien que la situation varie d’une année à l’autre, en fonction des conditions météorologiques. À droite les concentrations d’ozone en bleu foncé représentent des valeurs inférieures à 200 unités Dobson (DU), qui par convention sont considérées comme un « trou d’ozone » car il y a deux fois moins d’ozone qu’aux autres latitudes.
© Anne Boynard (LATMOS)

Les conditions météorologiques de septembre 2020 ont conduit à une diminution importante de la quantité d’ozone en Antarctique dans les semaines qui ont suivi, à l’inverse de la situation en 2019 où le trou dans la couche d’ozone avait été exceptionnellement petit. Les observations satellite du sondeur IASI montrent que c’est la diminution la plus importante observée durant les 15 dernières années, après ou à égalité avec celle de 2015.

Tant que le contenu de la stratosphère en chlore et en brome demeure élevé, une forte diminution d’ozone semblable à celle observée en 2020 pourra se reproduire lors d’hivers antarctiques très froids.

Cependant, ces observations ne remettent pas en cause le succès du Protocole de Montréal, qui a permis de stabiliser l’amplitude (c’est-à-dire le pourcentage de diminution d’ozone) et la superficie du trou dans la couche d’ozone observées ces dernières années (Figure 2). Selon le dernier rapport international d’évaluation de l’état de la couche d’ozone[1], elle devrait retrouver son niveau des années 1980 autour de 2065 au pôle sud. La date exacte sera fonction de la quantité de chlore présente dans l’atmosphère, qui diminue régulièrement mais dépend des stocks de gaz restants qui contiennent du chlore (par exemple les vieux réfrigérateurs), et des émissions illégales (des mesures récentes au Japon ont montré que c’est le cas en Chine).

Fig. 2 Évolution du trou dans la couche d’ozone, observé par les instruments IASI à bord des satellites Metop.
© Anne Boynard (LATMOS)

En plus de la variabilité météorologique qui explique pourquoi, certaines années, le trou dans la couche d’ozone est plus important que d’autres, le réchauffement climatique aura lui aussi un impact. En effet, plus les radiations sont piégées dans les basses couches de l’atmosphère, et plus les températures diminuent dans les couches supérieures. Ces températures plus faibles pourraient décaler encore un peu la date à laquelle la situation redeviendra normale, afin de ne plus parler chaque année du trou dans la couche d’ozone !


Référence

1 | WMO, "Scientific Assessment of Ozone Depletion : 2018", chapitre 4, 2018. Sur csl.noaa.gov

1 Ce phénomène peut occasionnellement se produire en Arctique, mais les températures étant en général moins basses (il n’y a pas de continent, qui stabilise les masses d’air froides), ce n’est pas systématique.