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Les principaux points du sixième rapport du Giec

Publié en ligne le 17 décembre 2022 - Climat -
Les résumés pour décideurs des rapports des trois groupes du Giec énoncent un certain nombre d’assertions organisées par sections. Chaque assertion est développée en quelques paragraphes. En nous appuyant sur un travail réalisé par le site fédéral belge pour une information fiable sur les changements climatiques [1], nous avons repris chaque assertion sans inclure les développements, mais en conservant la numérotation du document original pour que le lecteur intéressé puisse facilement se reporter à la version originale (en anglais) sur le site du Giec [2]. Notons aussi que les documents originaux incluent plusieurs figures, parfois complexes, qui ne sont pas reprises ici. De même, nous n’avons pas conservé les évaluations du degré de certitude car elles alourdissent la lecture.

Le texte original des rapports est parfois complexe et même confus. Nous avons fait quelques efforts pour le simplifier mais sans modifier toutes les tournures de phrases afin de conserver la plus grande fidélité aux documents que nous traduisons ci. Les notes entre crochets sont de la rédaction de SPS.

1 | Site fédéral belge pour une information fiable sur les changements climatiques, « Rapports du GIEC », 2022.
2 | Intergovernmental Panel on Climate Change, “Sixth assessment report”, 2022.

Groupe I – Les éléments scientifiques du changement climatique

Une inondation (détail),
John Everett Millais (1829-1896)

A. État du système climatique
A.1 L’influence humaine sur le système climatique est scientifiquement établie : elle se manifeste par un changement rapide et à grande échelle de différentes composantes (atmosphère, océans, cryosphère et biosphère), avec un impact sur les phénomènes climatiques extrêmes.
A.2 L’ampleur des changements récents et l’état actuel de nombreux aspects du système climatique sont sans précédent depuis plusieurs siècles à plusieurs millénaires.
A.3 Toutes les régions du monde subissent déjà les effets du changement climatique. Nous disposons de nouvelles observations et d’une meilleure compréhension de l’influence humaine sur les phénomènes climatiques extrêmes tels que les canicules, les précipitations intenses, les sécheresses et les cyclones tropicaux.
A.4 Une meilleure compréhension du fonctionnement du climat, des informations déduites des climats anciens, et l’analyse des variations du climat récent conduisent à une estimation de la sensibilité climatique à 3 °C, avec une incertitude plus faible que dans le rapport précédent [La sensibilité climatique est l’augmentation de température pour un doublement de la concentration en CO2].

B. Le futur du climat
B.1 La température [on parle ici de la température de l’atmosphère mesurée 2 m au-dessus de la surface et moyennée sur l’ensemble de la Terre] va continuer à augmenter jusqu’au milieu du XXIe siècle. Une augmentation de température de 1,5 puis 2 °C sera atteinte et même dépassée au cours du XXIe siècle sauf si l’humanité met en place des réductions importantes de ses émissions de CO2 et autres gaz à effet de serre.
B.2 Le réchauffement climatique entraînera des modifications du climat telles que la fréquence et l’intensité des canicules, des précipitations extrêmes, la diminution de la surface de neige, de permafrost [sol gelé] et de banquise ; une augmentation de la part des cyclones intenses et, dans certaines régions, des sécheresses.

La Chaleur (détail),
Florine Stettheimer (1871-1944)

B.3 Le réchauffement climatique va entraîner une intensification du cycle de l’eau, y compris sa variabilité, les précipitations des moussons et la sévérité des événements secs et humides.
B.4 Si les émissions de CO2 continuent à augmenter, l’absorption de carbone par les terres et les océans va diminuer [actuellement, cette absorption compense environ la moitié des émissions].
B.5 De nombreuses conséquences du changement climatique provoqué par les émissions de CO2 sont irréversibles pour des siècles ou des millénaires, en particulier les modifications des océans, des calottes polaires, et du niveau marin.

C. Risques et adaptation au changement climatique
C.1 Les variations naturelles du climat se superposent au changement climatique induit par les activités humaines, en particulier aux échelles régionales.
C.2 Les conséquences du changement climatique augmentent avec le niveau de réchauffement global.
C.3 Des événements inattendus, comme une déstabilisation massive des calottes polaires, une modification brutale des courants marins, ou un réchauffement significativement plus fort que celui simulé par les modèles, ne peuvent être exclus et doivent donc être envisagés.

D. Comment limiter le changement climatique
D.1 Pour limiter le réchauffement climatique, il faut réduire les émissions de CO₂ et parvenir à des émissions nettes nulles [i.e. avec des « puits » qui compensent les émissions résiduelles]. Réduire fortement les émissions des autres gaz à effet de serre est également nécessaire, notamment le méthane (CH₄). En effet, des réductions fortes, rapides et durables des émissions de ce gaz permettraient de compenser le réchauffement associé à la réduction de polluants atmosphériques (qui génèrent des aérosols) et amélioreraient la qualité de l’air.
D.2 Réduire drastiquement les émissions de CO₂ et des autres gaz à effet de serre aura des incidences notables sur la composition atmosphérique et la qualité de l’air à court terme (quelques années). Il faudra une vingtaine d’années pour que l’effet de ces réductions sur la température soit supérieur à la variabilité naturelle, et encore plus longtemps pour d’autres paramètres climatiques.

Groupe II – Les impacts, l’adaptation et la vulnérabilité

A. Introduction
B. Impacts du changement climatique en cours
B.1 Les changements climatiques d’origine humaine ont des effets négatifs généralisés et engendrent des pertes et dommages pour la nature et les populations. L’augmentation des événements météorologiques extrêmes entraîne des effets irréversibles sur les systèmes naturels et humains, poussés au-delà de leur capacité d’adaptation.

L’Orage,
Pierre Auguste Cot (1837-1883)

B.2 La vulnérabilité au changement climatique est variable suivant les régions, du fait des contextes socio-économiques et historiques. Entre 3,3 et 3,6 milliards d’humains vivent dans un contexte qui les rend fortement vulnérables au changement climatique. Une forte proportion des espèces non humaines est aussi vulnérable au changement climatique. Les vulnérabilités des humains et les écosystèmes sont interdépendants.
B.3 Un réchauffement climatique de 1,5 °C engendrerait une augmentation des dommages et des risques pour les humains et les écosystèmes. Limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C réduirait significativement les dommages et les risques pour les humains et les écosystèmes par rapport à ce qu’ils seraient pour des réchauffements supérieurs, mais ne les éliminerait pas.
B.4 À moyen et à long terme (au-delà de 2040), les impacts évalués sont jusqu’à plusieurs fois supérieurs à ceux observés actuellement. Leur ampleur et les risques qui y sont associés dépendent fortement des mesures d’atténuation et d’adaptation à court terme, et augmentent avec chaque accroissement du réchauffement climatique.
B.5 L’impact du changement climatique devient plus complexe et difficile à compenser. Dans le futur, des conséquences néfastes du changement climatique vont survenir simultanément, vont interagir avec d’autres risques non climatiques, entraînant alors des risques combinés et des risques en cascade affectant les secteurs économiques et les différentes régions du monde.
B.6 Si le réchauffement climatique dépasse temporairement 1,5 °C dans les prochaines décennies, les humains et les écosystèmes seront exposés à des risques graves, supérieurs à ce qu’ils seraient en restant sous ce seuil. Certains impacts du changement climatique vont libérer des gaz à effet de serre supplémentaires [aggravant alors les impacts], et d’autres seront irréversibles, même si la température redescend ensuite.

C. Mesures d’adaptation
C.1 Les mesures d’adaptation ont progressé dans tous les secteurs et régions avec des conséquences positives, mais restent inégalement réparties. De nombreuses mesures visent les conséquences à court terme, ce qui limite la possibilité d’une transformation structurelle.
C.2 Il existe des mesures d’adaptation efficaces et faisables qui permettent de réduire les risques du changement climatique pour les humains et les écosystèmes, mais leur efficacité décroît avec le niveau du réchauffement climatique.
C.3 Certaines limites aux capacités d’adaptation humaines ont été atteintes mais pourraient être compensées par des mesures financières et de gouvernance institutionnelle. À l’inverse, certains écosystèmes ont déjà atteint les limites de leur capacité d’adaptation. Avec une intensification du réchauffement climatique, certaines capacités d’adaptation des humains et des écosystèmes seront dépassées.
C.4 Il existe plusieurs exemples de mauvaises mesures d’adaptation au changement climatique qui augmentent la vulnérabilité, exacerbent les inégalités et engagent les sociétés dans une direction dont il sera difficile et coûteux de sortir. Une vision à long terme et intersectorielle est nécessaire pour éviter ces mauvaises mesures.
C.5 Des conditions favorables sont essentielles pour mettre en œuvre, accélérer et maintenir l’adaptation des sociétés humaines et des écosystèmes ; il s’agit notamment de l’engagement et du suivi politiques, des cadres institutionnels, des politiques assorties d’objectifs et de priorités clairs, de l’amélioration des connaissances sur les impacts et les solutions, de la mobilisation et de l’accès à des ressources financières adéquates, du suivi et de l’évaluation, et des processus de gouvernance inclusifs.

D. Un développement résilient au changement climatique
D.1 Les conséquences déjà observées du changement climatique, l’évaluation des risques futurs, les vulnérabilités et les limites d’adaptation démontrent qu’une action urgente est nécessaire.
D.2 Toutes les composantes de la société (gouvernements, secteur privé, société civile) doivent faire des choix collectifs et travailler de concert pour permettre un développement résilient au changement climatique.
D.3 La tendance à l’urbanisation offre des opportunités pour un développement résilient au changement climatique, avec des impacts bénéfiques y compris dans les zones rurales. Les villes côtières ont un rôle particulier dans ce cadre.
D.4 La sauvegarde de la biodiversité et des écosystèmes est fondamentale pour un développement résilient au changement climatique, compte tenu de leur rôle dans l’adaptation et l’atténuation mais aussi des menaces [à leur maintien]. Le maintien de la résilience de la biodiversité et des services écosystémiques à l’échelle mondiale dépend de la sauvegarde efficace et bien répartie d’environ 30 à 50 % des terres, des eaux douces et des océans planétaires.
D.5 Les formes de développement passées et actuelles n’ont pas contribué à un développement résilient au changement climatique et ont augmenté l’exposition des écosystèmes et des populations aux risques climatiques. L’action en faveur d’un développement résilient au changement climatique à l’échelle mondiale est urgente. Les mesures mises en œuvre au cours de la prochaine décennie orienteront les trajectoires à moyen et à long terme permettant, ou non, un développement résilient aux changements climatiques. Les options seront de plus en plus limitées si les émissions de gaz à effet de serre ne diminuent pas rapidement (en particulier si le réchauffement climatique dépasse 1,5 °C à court terme).

Un moulin à eau à Onden,
Hokusai (1760-1849)

Groupe III – Atténuation des changements climatiques

A. Introduction

B. Tendances récentes des émissions
B.1 Les émissions de gaz à effet de serre (GES) ont continué à augmenter au cours de la dernière décennie (2010-2019), mais à un taux d’augmentation moyen inférieur à celui observé au cours de la décennie précédente.
B.2 Les émissions de GES ont augmenté dans les principaux secteurs économiques (industrie, production énergétique, transport, agriculture, bâtiments) au niveau mondial depuis 2010. Les réductions d’émissions associées à l’amélioration technologique se sont avérées insuffisantes pour compenser l’augmentation des émissions associée à la croissance de l’activité dans les différents secteurs.
B.3 Les contributions des différentes régions du monde aux émissions globales continuent de présenter de fortes disparités, reflétant en partie des différences en matière de niveau de développement, bien que des différences importantes soient également observées entre régions présentant des niveaux de revenus comparables. Les 10 % de ménages dont les émissions par habitant sont les plus élevées contribuent de manière disproportionnée [3445 %] aux émissions mondiales de GES. Au moins 18 pays [dont la France] ont vu leurs émissions décroître depuis au moins 10 ans.
B.4 Le coût de nombreuses technologies « bas carbone » n’a cessé de décroître depuis 2010. Des politiques ciblées ont permis ces baisses de coût et ont aidé à une large diffusion de ces technologies. Le secteur numérique peut contribuer à réduire les émissions, mais peut aussi avoir des effets néfastes, en l’absence d’un contrôle approprié.

B.5 Depuis le cinquième rapport, des politiques et des lois relatives à l’atténuation [du changement climatique] ont été mises en place. Cela a permis d’éviter des émissions et d’augmenter les investissements dans les technologies et les infrastructures bas carbone.
B.6 Les émissions mondiales de GES en 2030, telles que définies par les engagements nationaux annoncés avant la COP26, rendraient probable un réchauffement supérieur à 1,5 °C au cours du XXIe siècle. Limiter le réchauffement climatique à 2 °C nécessitera une forte intensification des efforts de réduction à partir de 2030. Les politiques mises en œuvre jusqu’en 2020 vont conduire à des émissions qui sont supérieures à celles estimées sur la base des engagements nationaux [à l’occasion de la COP26].

[Note : dans ce résumé du GIEC, limiter à 1,5 °C signifie par défaut qu’il y aurait au moins 50 % de chances de rester sous 1,5 °C de réchauffement moyen par rapport au niveau préindustriel, et limiter à 2 °C signifie qu’il y aurait au moins 67 % de chances de rester sous 2 °C).]

Le Repas frugal,
Émile Friant (1863-1932)

C. Transformations requises pour limiter le réchauffement
C.1 Selon les modèles, les émissions doivent commencer à décroître avant 2025 pour maintenir le réchauffement sous le seuil de 1,5 ou 2 °C, ce qui implique une action immédiate et des réductions profondes au cours des prochaines décennies. Sans un renforcement des politiques actuelles, les émissions de GES continueront à augmenter au-delà de 2025, menant à un réchauffement compris entre 2,2 et 3,5 °C (valeur médiane : 3,2 °C) en 2100.
C.2 Les trajectoires d’émissions compatibles avec le seuil de 1,5 °C atteignent la neutralité carbone [les puits de carbone compensent les émissions résiduelles] en 2050 (2070 pour le seuil de 2 °C). La plupart d’entre elles évoluent ensuite vers des émissions nettes négatives. Ces trajectoires impliquent également des réductions substantielles des émissions des autres GES. Le niveau du pic de température dépend du niveau des émissions cumulées de CO₂ avant l’atteinte de la neutralité carbone et de l’évolution des émissions des autres GES. Des réductions profondes de ces autres GES, notamment le méthane, d’ici 2030 et 2040, permettraient de diminuer le niveau de réchauffement mais aussi de moins recourir à des actions de pompage de carbone au cours de la seconde moitié du siècle.
C.3 Toutes les trajectoires d’émissions compatibles avec les limites de 1,5 ou 2 °C impliquent des réductions d’émissions de GES rapides (voire immédiates) et drastiques dans tous les secteurs. Les stratégies d’atténuation modélisées pour parvenir à ces réductions incluent (i) le passage des combustibles fossiles à des sources d’énergie bas carbone, comme les énergies renouvelables ou les combustibles fossiles avec capture et piégeage du CO2 [le nucléaire n’est pas mentionné ici], (ii) des mesures axées sur la demande et l’amélioration de l’efficacité énergétique, (iii) la réduction des émissions autres que le CO2 et (iv) le déploiement de méthodes de pompage du dioxyde de carbone pour contrebalancer les émissions résiduelles de GES. Les scénarios illustratifs présentent différentes combinaisons de stratégies d’atténuation sectorielles compatibles avec un niveau de réchauffement donné.
C.4 La réduction des émissions du secteur énergétique implique des transformations majeures, dont une réduction substantielle du recours aux combustibles fossiles, le déploiement des sources énergétiques à basses émissions, le passage à des vecteurs énergétiques alternatifs, l’efficacité et la préservation des ressources énergétiques. La poursuite de l’installation d’infrastructures basées sur les énergies fossiles, et sans dispositif de piégeage du CO2, conduirait à des émissions futures de GES incompatibles avec les objectifs climatiques.
C.5 Il est difficile mais possible d’atteindre la neutralité carbone dans l’industrie, moyennant la transformation des processus de production, la circularité des flux de matériaux, une gestion de la demande, et en ayant recours à des sources et des vecteurs énergétiques décarbonés. La progression vers des émissions nulles dans l’industrie sera permise par l’adoption de nouveaux processus de production utilisant de l’électricité, de l’hydrogène et des carburants sans GES, ainsi que par la gestion du carbone [capture et séquestration du CO2].
C.6 Les zones urbaines peuvent évoluer vers la neutralité carbone via une transition systémique des infrastructures et de l’aménagement urbain. Cela implique notamment la réduction de la consommation énergétique et de matériaux, l’électrification, l’absorption de carbone dans l’environnement urbain et la réduction des émissions tout au long des chaînes d’approvisionnement.
C.7 Des politiques adéquates ciblant le secteur des bâtiments (nouveaux bâtiments et rénovation du bâti existant) présentent un potentiel significatif pour contribuer à la décarbonation du secteur à l’horizon 2050, tout en contribuant à adapter les bâtiments au climat futur.
C.8 Des mesures de limitation de l’usage et les technologies « bas carbone » permettent de réduire les émissions du secteur des transports dans les pays développés et d’en réduire la croissance dans les pays en développement. Les voitures électriques présentent le plus grand potentiel de décarbonation pour le transport terrestre. Les agrocarburants durables peuvent apporter des bénéfices additionnels à court et moyen terme ; ils peuvent également contribuer à diminuer les émissions des transports maritime et aérien et du transport routier de marchandises, de même que l’hydrogène et les carburants synthétiques (moyennant l’amélioration technologique et la réduction des coûts). De nombreuses stratégies de réduction des émissions de GES dans le secteur du transport présentent de multiples co-bénéfices, concernant notamment l’amélioration de la qualité de l’air, la santé, l’accès équitable aux services de transport, la réduction de la congestion et de la demande en matériaux.
C.9 Les possibilités d’action dans le secteur des sols, de l’agriculture et de la sylviculture permettent d’envisager des réductions des émissions (ou l’augmentation de l’absorption) à grande échelle, mais ne permettent pas de totalement compenser les émissions résultant d’actions trop tardives dans les autres secteurs. Ces actions comportent de nombreuses opportunités de co-bénéfices (conservation de la biodiversité, services écosystémiques, moyens de subsistance) et de réduction des risques (notamment via l’adaptation). Les obstacles à la mise en œuvre des bonnes pratiques peuvent résulter des impacts du changement climatique, des demandes concurrentes sur les terres, de conflits d’usage avec la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance, de la complexité des systèmes de propriété et de gestion des terres, ainsi que des aspects culturels.
C.10 Les mesures agissant sur la consommation (dont les changements socioculturels et comportementaux) et les innovations en matière de fourniture de services aux usagers finaux permettent d’envisager des baisses d’émissions importantes (40 à 70 % en 2050 par rapport à un scénario de référence, sans mesure spécifiques), tout en améliorant le bien-être.
C.11 Le déploiement des technologies d’extraction du CO₂ pour contrebalancer les émissions résiduelles est inévitable pour atteindre la neutralité carbone. L’échelle et le moment opportun du déploiement de ces technologies dépendront des trajectoires de réductions des émissions dans les différents secteurs. Il dépendra également des développements techniques et des contraintes diverses, en particulier pour un déploiement à grande échelle.
C.12 Des mesures coûtant 100 $ par tonne d’équivalent CO2 [les autres gaz à effet de serre sont comptabilisés en équivalent CO2 pour leur impact climatique] ou moins pourraient réduire les émissions mondiales de GES de moitié, voire plus, avant 2030. Le PIB mondial continue de croître dans les scénarios modélisés mais il est inférieur de quelques pourcents en 2050 par rapport aux trajectoires des politiques actuelles sans atténuation supplémentaire. Dans la plupart des publications évaluées, le bénéfice économique global associé à la limitation du réchauffement à 2 °C excède les coûts de l’atténuation.

D. Renforcement des mesures de réponse et liens avec le développement durable
D.1 Une action accélérée et équitable pour atténuer le changement climatique et s’adapter à ses impacts est essentielle pour assurer le développement durable. Certaines actions peuvent engendrer des effets néfastes, qu’il est possible de contrecarrer par des politiques appropriées. Les objectifs de développement durable [ODD, objectifs fixés par les Nations unies afin de « parvenir à un avenir meilleur et plus durable pour tous »] peuvent être utilisés pour évaluer les actions climatiques.
D.2 Il existe un lien étroit entre le développement durable, la vulnérabilité et les risques climatiques. Des ressources économiques, sociales et institutionnelles limitées entraînent souvent une forte vulnérabilité et une faible capacité d’adaptation, en particulier dans les pays en développement. Des politiques et une planification intersectorielle coordonnées peuvent optimiser les synergies et éviter ou réduire les compromis nécessaires entre atténuation et adaptation.
D.3 Réussir à aller vers un développement durable conduit à redistribuer, à l’intérieur et entre les pays. Un souci d’équité, associant le plus largement possible tous les acteurs, sera garant de la confiance sociale et du soutien aux changements nécessaires.

E. Renforcer l’action
E.1 Il existe des solutions pour réduire les émissions qui sont adaptées aux différentes situations et peuvent être mises en œuvre à court terme. Leur déploiement peut être accéléré en levant les barrières (physiques, environnementales, économiques, technologiques, socioculturelles) et en créant un cadre propice. Des mesures additionnelles à court terme, audelà des engagements nationaux annoncées avant la COP26, peuvent augmenter le réalisme des scénarios qui limitent le réchauffement à 1,5 °C.
E.2 Les politiques de réduction des émissions de GES sont d’autant plus efficaces qu’elles s’inscrivent dans le contexte plus large de la transition systémique et du développement durable, et permettent des synergies avec les ODD.
E.3 Une gouvernance climatique constitue un cadre (légal, stratégique, institutionnel) favorisant le développement et la mise en œuvre des politiques de réduction des émissions de GES. Elle est d’autant plus efficace qu’elle intègre plusieurs domaines d’action politique, aide à créer des synergies et à minimiser les effets néfastes, et connecte les différents niveaux de pouvoir (national et sous national). Une gouvernance climatique efficace et équitable repose sur l’engagement des acteurs politiques, de la société civile, des entreprises, de la jeunesse, des syndicats, des médias et des communautés locales.
E.4 De nombreux instruments réglementaires et économiques ont déjà été déployés avec succès. La manière dont ils sont élaborés et mis en œuvre peut contribuer à atteindre d’autres objectifs (tels que l’équité, qui peut être favorisée en utilisant les revenus issus de la taxation du carbone pour aider les ménages à faibles revenus). S’ils étaient renforcés et appliqués à plus grande échelle, ces instruments permettraient de réaliser d’importantes réductions d’émissions et de stimuler l’innovation. Des politiques coordonnées et cohérentes sont plus efficaces que des politiques menées isolément pour opérer la transition vers une société bas carbone.
E.5 Les flux financiers actuels sont insuffisants pour atteindre les objectifs de réduction des émissions dans tous les secteurs et régions du monde (principalement dans les pays en développement). L’augmentation de ces flux peut être favorisée par des choix et signaux clairs de la part des gouvernements et de la communauté internationale. Le renforcement de la coopération financière internationale est un facteur clé pour opérer une transition juste et prendre en compte les inégalités dans l’accès au financement et dans les coûts des impacts des changements climatiques.
E.6 La coopération internationale est un levier critique pour permettre d’atteindre des objectifs climatiques ambitieux. Les accords internationaux (CCNUCC, Protocole de Kyoto, Accord de Paris) promeuvent l’augmentation des ambitions nationales et la mise en œuvre de politiques climatiques, mais celles-ci restent insuffisantes.