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Mines et carrières : quel cadre réglementaire ?

Publié en ligne le 21 juillet 2025 - Environnement et biodiversité -

L’extraction de ressources naturelles soulève de nombreuses questions d’ordre économique, patrimonial, environnemental ou sociétal. Elle fait l’objet de réglementations assez strictes en France et dans l’Union européenne, avec de nombreuses facettes, environnementales en particulier.

Cadre réglementaire français

En France, on distingue les mines des carrières par la nature du produit extrait (par exemple : carrière de calcaire, mais mine de bauxite) [1]. Il existe des carrières souterraines et des mines à ciel ouvert.

Les mines sont encadrées sur le plan réglementaire par le code minier qui précise que l’État dispose du sous-sol et accorde les autorisations d’exploiter, le plus souvent sous forme de concessions. Les minéraux jugés d’« intérêt général » relèveront ainsi des mines.

Les carrières, quant à elles, relèvent du statut des Installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et sont soumises aux dispositions du code de l’environnement. Le propriétaire du sol est aussi propriétaire du sous-sol et peut en disposer librement [2]. Ne sont pas concernées les petites carrières de certains matériaux (par exemple : carrière de marnes pour améliorer les sols agricoles, carrière de pierres pour restauration de bâtiments historiques), sans but commercial, d’une superficie inférieure à 500 m2 et pour une quantité totale d’extraction n’excédant pas 1 000 tonnes dans un intérêt public (par exemple, restauration de bâtiments publics).

À noter que l’extraction de matériaux est parfois réalisée par des dragages dans les cours d’eau. Ce type d’extraction est régi par la loi sur l’eau [3].

Les mines
Un projet minier est un lourd projet d’investissement qui implique la prise en compte de nombreux paramètres techniques, économiques, environnementaux et sociaux. Il passe par plusieurs étapes successives : estimation du potentiel minier ; accord des propriétaires fonciers, travaux d’exploration minière ; étude de faisabilité technique, économique et environnementale et obtention des autorisations administratives. Ensuite seulement, l’exploitation peut débuter. Une fois le gisement épuisé (au sens technico-économique) ou à la suite d’un arrêt pour raison environnementale ou sociétale, l’exploitation s’achève. La fermeture et la réhabilitation ou la reconversion du site marque alors la dernière étape du projet minier. Ces dernières phases doivent être réfléchies dès les étapes initiales d’exploration et d’étude de faisabilité, condition indispensable à l’obtention des autorisations d’exploiter.

Au cours des XIXe et XXe siècles, l’État a délivré 4 384 titres miniers, dont 3 144 concessions permettant l’exploitation de substances minières au sens du Code minier, dont des hydrocarbures (gaz et pétrole) et l’uranium. Il reste à ce jour très peu de mines exploitées en France, notamment des mines de sel dans les Landes, en Lorraine, dans le couloir rhodanien ; une mine de calcaires bitumineux dans l’Ain, des mines de bauxite dans l’Hérault, des mines d’or en Guyane et de nickel en Nouvelle-Calédonie [4].

Les carrières
Pour obtenir l’autorisation d’exploiter une carrière en France, il faut suivre plusieurs démarches liées à la réglementation en vigueur : étude d’impact qui évalue les effets du projet sur l’environnement, la santé, le paysage, le patrimoine, etc. ; plan de gestion des déchets d’extraction (collecte, tri, valorisation ou élimination) ; conformité du projet aux documents d’urbanisme locaux ; concertation avec les acteurs locaux sur l’usage futur du site et les mesures de remise en état après l’exploitation. Après instruction favorable du dossier par les services de l’État et la conduite d’une enquête publique, le préfet peut alors signer l’arrêté d’autorisation d’exploitation qui précise les conditions à respecter pour mener les opérations d’extraction et de traitement. Entre vingt et trente nouvelles autorisations d’exploitation sont délivrées chaque année [5].

La France compte aujourd’hui plus de 3 300 carrières en exploitation (talc, gypse, sable alluvionnaire, calcaire, andalousite, kaolin, sable siliceux, diatomite, pierres de construction…) [5] lui assurant ainsi une certaine indépendance pour fournir les trois grandes catégories suivantes : matériaux de construction, roches ornementales et minéraux industriels [6]. Les carrières en France emploient environ 40 000 personnes [5].

Cadre réglementaire dans d’autres pays

La distinction sur la nature du produit, selon qu’il soit considéré comme stratégique ou non, se retrouve dans plusieurs pays (Espagne, Pologne, Chine…). Elle n’existe pas au niveau fédéral aux États-Unis, mais peut exister dans certains États américains. Dans de nombreux pays, les ressources peuvent, selon leur nature, appartenir en partie ou en totalité à l’État (Espagne, Pologne, Chine…), aux provinces (Canada) ou à la nation (Afrique du Sud). Aux Etats-Unis, les propriétaires fonciers détiennent les droits sur les ressources souterraines, quelles qu’elles soient. Cela signifie que les propriétaires américains peuvent négocier directement avec les entreprises pour en assurer l’exploitation. Cette différence de droits fonciers explique par exemple la prolifération de l’extraction des gaz de schiste aux États-Unis, par ailleurs interdite en France.

La Carrière, John Frederick Herring Sr. (1795-1865)

Si les modalités de mise en œuvre d’un projet peuvent varier d’un pays à l’autre, les mêmes thèmes reviennent souvent dans les réglementations locales : démonstration de l’intérêt économique sur la base des investigations géologiques, droit foncier sur les terrains concernés, impacts et mesures de protection de l’environnement, obligations de sécurité des opérations, fermeture et réhabilitation. Chaque pays peut exiger des études spécifiques ou des autorisations particulières. À titre d’exemple, au Canada, le porteur de projet est tenu de consulter les premières nations (peuples autochtones vivant sur les territoires ancestraux) et de trouver des accommodements, le plus souvent financiers, pour permettre l’exploitation minière. Le Forum intergouvernemental sur l’exploitation minière, les minéraux, les métaux et le développement durable (IGF), qui regroupe plus de quatre-vingts États membres, travaille à promouvoir des pratiques minières responsables et durables à travers le monde, notamment en aidant les pays à gérer leurs ressources minières de manière bénéfique pour leurs populations et l’environnement [7].

Impacts sur l’environnement

Depuis plusieurs décennies, en particulier en Europe, l’encadrement des activités d’extraction a énormément évolué. Dans l’Union européenne, la prise en compte des impacts environnementaux est décrite dans une directive de 2011 [8]. Cette directive établit également l’obligation pour les États d’instituer une autorité environnementale indépendante qui évalue la qualité et l’importance des mesures proposées (cela concerne tout projet et en particulier les carrières et les mines).

En France, la loi du 4 janvier 1993 fait obligation aux exploitants d’effectuer une remise en état du site [9]. Les sites abandonnés avant 1993 ont été inventoriés et la réhabilitation de ceux qui seraient problématiques pour des raisons environnementales ou de sécurité est prise en charge par l’État, quand les exploitants, cas majoritaire, ont disparu.

Ayant mené l’étude d’impact, le porteur du projet doit alors démontrer qu’il a mis en œuvre le concept « éviter, réduire, compenser » [10], moyen de limiter l’impact de l’activité extractive sur son milieu. Il englobe l’ensemble des thématiques de l’environnement (air, bruit, eau, sol, santé des populations, biodiversité, etc.) et s’applique de manière proportionnée aux enjeux. Lorsque l’impact ne peut être évité, le pétitionnaire doit démontrer qu’il a proposé tous les moyens pour le réduire au maximum. En cas d’impact résiduel jugé trop important par l’autorité environnementale, des mesures de compensations peuvent être alors exigées par les services préfectoraux (recréation de gîtes d’habitat pour certaines espèces, reboisement…).

Au-delà de la biodiversité, les impacts à étudier concernent le bruit, la poussière, l’eau, les modifications du paysage, le déboisement si nécessaire, le trafic routier engendré par l’activité et depuis maintenant quelques années, les émissions de gaz à effet de serre [11].

Le projet de remise en état après la fin de l’exploitation doit prévoir de laisser la place à des espaces verts ou des zones de loisir au bénéfice de l’environnement et des populations locales [12, 13]. Ce projet doit être validé par le maire de la commune avant que ne soit accordée l’autorisation d’exploitation ; des garanties financières permettent de pallier une éventuelle défaillance de l’entreprise.

Références


1 | Minéral Info, "Les mines en France", portail français des ressources minérales non énergétiques.
2 | DREAL Provence-Alpes-Côte d’Azur, " Mine ou carrière ?", 16 août 2023.
3 | Préfecture du Gers, " Comment constituer un dossier "loi sur l’eau" pour tout projet ayant un impact sur les milieux aquatiques " 2024.
4 | Dupuy CN et al., "Industrie minérale et activité minière en France", février 2017.
5 | BRGM, "Publication de la nouvelle carte des carrières de France en 2020", site de données, 30 octobre 2020
6 | Wallard I, "Matières premières et nouvelles dépendances", Responsabilité & Environnement, juillet 2020
7 | Site du Forum intergouvernemental sur les mines, les minéraux, les métaux et le développement durable (IGF)
8 | Union européenne, "Directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011, modifiée par la Directive 2014/52/UE", 16 avril 2014.
9 | Légifrance, " Loi n° 93-3 du 4 janvier 1993 relative aux carrières ", 21 septembre 2000
10 | Ministères de l’Aménagement du territoire et de la transition écologique, "Éviter, réduire et compenser les impacts sur l’environnement", 23 janvier 2025.
11 | Légifrance, " Article L. 229-25 du Code de l’environnement , 6 décembre 2023.
12 | Légifrance, " Article L515-3 du Code de l’environnement ", 6 mai 2010
13 | Légifrance, " Articles R512-39-1 à R512-39-6 du Code de l’environnement ", 8 juillet 2024