Du bon usage du scepticisme en science
L’art pariétal de la grotte d’Altamira
Publié en ligne le 10 décembre 2023 - Esprit critique et zététique -
Traduction des pages 28 à 31 pour Science et pseudo-sciences faite par Jacques Van Rillaer.
Les intertitres sont de la rédaction de Science et pseudo-sciences.
Les innombrables exemples de la crédulité humaine montrent que nous avons besoin de davantage de scepticisme. Mais parfois la pensée sceptique et critique s’avère excessive, de sorte qu’il nous arrive de rejeter des déclarations correctes. Pour cela, il est très instructif d’étudier des exemples historiques. Ainsi Don Marcelino Sanz de Sautuola ne fut cru par personne lorsqu’il publia en 1880, avec le professeur Juan Vilanova y Piera de l’université de Madrid, un texte dans lequel il annonçait avoir découvert des dessins et des peintures dans une grotte à Altamira (nord de l’Espagne).
La découverte des peintures de la grotte d’Altamira
De Sautuola était un archéologue amateur, propriétaire du terrain où se trouvait la grotte. En 1878, il avait visité l’Exposition universelle de Paris et avait alors été fasciné par une exposition d’outils préhistoriques trouvés en France. À son retour, il se mit à explorer les grottes de la région dans l’espoir de découvrir des traces de présence humaine à l’époque préhistorique. Il avait déjà exploré la grotte d’Altamira, mais n’avait rien trouvé de particulier. En novembre 1879, il renouvela sa visite. Son attention se dirigeait sur le sol : peut-être s’y trouvait-il des outils, des haches ou des perles. Sa fille Maria, âgée de douze ans, l’accompagnait. À un moment, elle regarda vers le plafond et vit des dessins de bisons. Lorsque de Sautuola regarda la scène, il fut abasourdi. Sur une longueur d’une vingtaine de mètres étaient peints plusieurs bisons, presque grandeur nature, incroyablement expressifs et détaillés. De Sautuola déclara par la suite qu’il avait ri de l’absurdité de la situation : ce qu’il espérait trouver était juste au-dessus de sa tête tandis qu’il regardait vers le sol. Mais il fut aussi profondément ému par la qualité artistique de ce qu’il voyait. Gregory Curtis, dans un beau livre sur l’art préhistorique [1], écrit : « Ce jour-là de novembre 1879, où Marcelino Sanz de Sautuola resta sans voix sous le plafond peint de la grotte d’Altamira, ce fut, pour autant que nous sachions, la première fois qu’un artiste de l’âge de pierre bouleversa une personne moderne. »

