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La petite histoire des grands médicaments

Publié en ligne le 11 janvier 2023
La petite histoire des grands médicaments
Comment la recherche a changé nos vies
Marie-Morgane Le Moël
Autrement, 2022, 223 pages, 17 €

Le livre reprend l’historique de huit avancées de la pharmacologie : l’aspirine, l’insuline, la pénicilline, les premiers contraceptifs, les premiers anticancéreux, les premiers neuroleptiques, les anti VIH, le Viagra, ainsi que celui de la vaccination.

Cette petite histoire décrit surtout les progrès de la médecine avant l’avancée scientifique des cinq dernières décennies et n’aborde pas l’histoire des découvertes et du développement des médications actuelles qui s’appuient sur les progrès de la science désormais basée sur les interactions moléculaires, autre histoire passionnante que pourrait nous conter Marie-Morgane Le Moël.

L’historique très documenté de ces avancées thérapeutiques se lit avec intérêt car il apporte des informations rarement présentées. À titre d’exemple, l’historique de l’usage des décoctions d’écorce de saule (Salix alba) est largement présenté, remontant au XVIe siècle av. J.-C. Puis suit toute l’évolution vers la découverte du principe anti-inflammatoire : l’acide salicylique, et la synthèse de l’acide acétylsalicylique, c’est-à-dire l’aspirine dont la dénomination dérive pour partie de l’ancien nom de la Reine-des-prés (Spiraea ulmaria), qui produit aussi de l’acide salicylique.

Mentionnons également la présentation très détaillée de l’historique de la découverte de la vaccination, avec le rôle de Lady Montagu, épouse de l’ambassadeur de Grande-Bretagne à Constantinople, au début du XVIIIe siècle, le rôle du docteur Edward Jenner à la fin de ce même siècle, et bien sûr les différentes étapes de la mise au point des premiers vaccins par Pasteur en 1885.

Deux imprécisions peuvent toutefois être signalées, l’une d’ordre historique, l’autre, plus importante, d’ordre « technique ». Actuellement, les présentations orales sèches unitaires sont les gélules, les comprimés et les sachets. Les cachets, formés de deux cupules en pain azyme, cachetées, ont été abandonnés dans les années 1970, date d’apparition des gélules (rappelons toutefois que le livre couvre la période précédant les cinq dernières décennies).

Le terme « sérum », largement utilisé à tort dans cet ouvrage comme dans de nombreux médias pour parler de vaccins, crée une confusion. Ces deux médications sont très différentes. Les vaccins correspondent à une préparation élaborée à partir de germes (virus, bactéries ou leurs constituants antigéniques). Ils ont pour objectif de développer des anticorps spécifiques chez le sujet auquel ils sont injectés, dans un but de prévention en cas de contamination future par l’agent pathogène ciblé. Les sérums, au contraire, sont des préparations à base d’anticorps spécifiques. Leur injection a pour objectif de suppléer l’absence ou l’insuffisance de synthèse d’anticorps spécifiques par le sujet. Historiquement, ils étaient préparés à partir de sang de cheval pré-immunisé. Aujourd’hui, ils peuvent être remplacés par des anticorps monoclonaux obtenus par synthèse biologique. Dans cette « petite histoire », ce n’est pas du sérum qu’il est question, mais seulement des vaccins.

Mis à part ces deux objections, ce livre mérite pleinement d’être lu pour les informations historiques riches, détaillées et pointues qui sont présentées ; il permet d’apprécier la distance séparant l’époque de ces découvertes de la recherche médicale actuelle qui bénéficie des progrès scientifiques des dernières décennies. C’est un ouvrage attractif, dont l’écriture est fluide et agréable à lire.