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Le « binge drinking », nouvelle forme d’alcoolisation chez les jeunes

Publié en ligne le 9 février 2023 - Santé et médicament -

Le « binge drinking » 1, aussi désigné sous les noms de « beuverie express », « biture express », « hyper-alcoolisation » ou encore « alcoolisation massive », est une pratique apparue en France au début des années 2000 et importée du monde anglo-saxon. Le terme retenu dans la littérature scientifique est « alcoolisation ponctuelle importante » (API). Il désigne la pratique consistant à boire une forte quantité d’alcool en une seule occasion de consommation : au moins l’équivalent de 50 g d’alcool pur selon l’OMS, de 70 g pour les hommes et 56 g pour les femmes selon les Instituts américains de la santé [1]. Les variations de quantité et de durée (deux heures, sept heures, « en une occasion »…) peuvent conduire à identifier des populations légèrement différentes [2].Cette pratique qui concerne particulièrement les jeunes et les étudiants vise, pour une certaine part de la population concernée, à « atteindre l’ivresse voire dans certains cas extrêmes le coma éthylique le plus rapidement possible » [3]. Bières et prémix (mélanges de boissons sucrées et alcoolisées) sont privilégiés devant les spiritueux et les vins et champagnes. Ce comportement n’est pas forcément lié à une addiction à l’alcool, bien que, chez les jeunes entre 18 et 25 ans, il multiplie par trois le risque de devenir dépendant [4].

En 2017, une étude s’est intéressée aux API chez les jeunes de 17 ans en France [1]. Si l’usage régulier d’alcool est le fait de 8,4 % d’entre eux, ils sont 44 % à déclarer une API au cours du mois écoulé et 16 % au moins trois. Ce phénomène touche plus particulièrement les garçons (près de 50 %) que les filles (38 %), mais cette différence s’est amenuisée entre 2005 et 2017, suivant ainsi une tendance observée dans de nombreux pays [5]. Il concerne plus souvent les adolescents issus des classes favorisées. L’API chez ces jeunes couvre cependant une certaine variabilité de situations : 63 % atteignent une alcoolémie supérieure à 0,8 g par litre de sang (et 20 % plus de 2 g/l).

Ces comportements d’alcoolisation durant l’adolescence sont particulièrement préjudiciables à la santé, impactant les processus de maturation du cerveau en plus des conséquences déjà identifiées de l’alcool (certaines étant aggravées par cette pratique) [3].

Le « binge drinking » se retrouve également dans une population plus âgée. Aux États-Unis, cela concerne un adulte sur six (les hommes plus que les femmes). Les personnes à plus hauts revenus (plus de 75 000 $ de revenus annuels) participent plus fréquemment à des épisodes de « binge drinking » mais consomment globalement moins d’alcool lors de ces épisodes que ceux ayant des revenus plus modestes [6]. En France, 35,2 % des personnes ont un épisode d’API au moins une fois par an, et 4,6 % au moins une fois par semaine [7].

Références
1 | Observatoire français des drogues et des tendances addictives, « ESCAPAD : 20 ans d’observation des usages à l’adolescence », Rapport de l’unité Data, mars 2022. Sur ofdt.fr
2 | Rolland B et al., “Comparison between the WHO and NIAAA criteria for binge drinking on drinking features and alcohol-related aftermaths : Results from a cross-sectional study among eight emergency wards in France”, Drug Alcohol Depend, 2017, 175 :92-8.
3 | Inserm, « Conduites addictives chez les adolescents : usages, prévention et accompagnement », Expertise collective, 2014. Sur ipubli.inserm.fr
4 | Inserm, « Alcool et santé : lutter contre un fardeau à multiples visages », Dossier, 25 octobre 2021. Sur inserm.fr
5 | European School Survey Project on Alcohol and Other Drugs, “Substance use among students in 36 European countries”, Report, mai 2012. Sur espad.org
6 | Centers for Disease Control and Prevention, “Binge drinking”, 6 janvier 2022. Sur cdc.gov
7 | Richard JB et al., « La consommation d’alcool chez les adultes en France en 2017 », Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, 2019, 5-6 :89-97.

1 Binge, en anglais, signifie « excessif », « avec frénésie ».