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Treize arguments non valables pour défendre les parasciences

Publié en ligne le 5 juillet 2004 - Esprit critique et zététique -

L’absence de résultats probants oblige les défenseurs des parasciences à user d’arguments apparemment imparables mais qui, à l’étude, se dégonflent rapidement. En voici treize parmi les plus utilisés.

(1) Le syndrome galiléen

Ma « science » est victime de critiques comme l’a été celle de Galilée, qui avait raison avant tout le monde... Sous-entendu : donc ma « science » est aussi valable que la théorie de Galilée ! Rappelons au passage que Galilée fut persécuté par le clergé, et non par des scientifiques... Selon cet argument, il y aurait un persécuteur (la science « officielle ») et une victime (la parascience). Il est vrai que certaines découvertes ont été accueillies avec scepticisme, et que le temps leur donna raison. Mais il est aussi vrai que dans leur immense majorité, les hypothèses accueillies avec scepticisme se sont révélées inexactes. L’accueil négatif d’une idée nouvelle ne lui confère aucune valeur. Mais en se posant en tant que victime, une parascience s’attire de la sympathie. Loin d’être une quelconque démonstration de la valeur de la théorie, le syndrome galiléen est d’abord un acte de communication.

(2) L’argument de « l’ampoule électrique »

Celui qui aurait dit, il y a 500 ans, qu’un jour on s’éclairerait avec des ampoules électriques serait passé pour un fou, et pourtant... La parascience d’aujourd’hui serait donc la science de demain... Même chose que pour le syndrome galiléen, l’analogie n’a pas valeur de démonstration celui qui a prédit il y a 500 ans que les baleines voleront de leurs propres ailes au XX, siècle s’est trompé.

(3) L’argument d’autorité

Le témoignage favorable de célébrités médiatiques, voire scientifiques, ne constitue qu’un... témoignage. Ce n’est pas parce qu’une personne, quelle que soit sa valeur, croit en une chose, que cette chose a reçu une preuve. Nombre de scientifiques croient en Dieu : cela prouve-t-il que Dieu existe ? Non. Simplement que ces personnes croient en quelque chose. Pas plus. Ce qui compte, ce n’est pas le titre, mais la qualité de la démonstration, son étayage. Finalement, cet argument d’autorité, très à la mode chez les tenants des parasciences, se retourne contre ceux qui l’utilisent : les chercheurs réputés qui récusent les parasciences sont beaucoup plus nombreux que ceux qui les acceptent...

(4) L’argument historique

L’intérêt pour le paranormal et les parasciences existe depuis longtemps (des millénaires pour l’astrologie) : c’est donc qu’il y a quelque chose... Rappelons que l’idée selon laquelle la Terre était plate a tenu plusieurs siècles (au moins...), celle de la Terre au centre de l’Univers aussi, et que de nos jours, dans certaines contrées, on continue à sacrifier des animaux pour influencer les divinités... Faut-il en dire plus ? L’argument historique démontre simplement qu’à diverses époques des croyances se sont maintenues dans une part de la population.

(5) L’argument du nombre

Si un grand nombre de personnes croient à quelque chose, c’est qu’il y a sans doute du vrai... L’existence d’un fait ne se décrète pas par un vote : une croyance majoritaire ne transfère pas à celle-ci le caractère de « vérité » scientifique.

(6) L’argument de l’expérience personnelle

C’est vrai puisque je l’ai constaté ! Affirmation péremptoire contre laquelle on ne peut rien. Critiquer sa croyance, c’est critiquer la personne en tant que sujet d’une expérience vécue, donc mettre en doute sa bonne foi, son honnêteté... Hélas, croyances, perceptions, mémorisation, méconnaissance de nos limites et charlatans nous jouent des tours. Ainsi, la valeur d’analyse d’une expérience par celui qui l’a vécue est très faible et peu fiable. Et même un témoignage qui serait exact et positif pour une parascience (du type astrologie ou voyance), ne serait pas suffisant : dans ces cas, un succès isolé ne prouve rien ! Il peut parfaitement être le fruit d’une coïncidence.

(7) L’argument du bon cas

Une expérience, produite dans des conditions rigoureuses et devant des observateurs incontestables, qui fournirait des résultats statistiquement significatifs ou produirait des phénomènes incontestables, pourrait être un argument valable. Hélas, ce « bon cas’, régulièrement annoncé, on l’attend toujours...

(8) L’argument de l’atmosphère défavorable

Les sceptiques, vérificateurs d’expériences consacrées aux parasciences, sont si pointilleux sur le contrôle de celles-ci que les sujets doués de « pouvoirs » (voyance, psychokinèse et télépathie) perdent leurs moyens. En clair, le phénomène n’est reproductible que si l’on ne contrôle pas « trop » sa réalité ! C’est évidemment plus facile...

(9) L’argument de la méconnaissance du dossier

Ceux qui critiquent ne connaissent rien au dossier... Celui qui veut noyer son chien l’accuse d’avoir la rage ! Pas de chance, il y a parmi les sceptiques de nombreuses personnes qui ont étudié les dossiers qu’ils critiquent. Et ceux qui prétendent connaître le sujet font souvent preuve d’une méconnaissance assez terrible.

(10) Les arguments de l’inconnu qui dérange, de l’incapacité à expliquer, de la fermeture d’esprit et du refus idéologique

L’inconnu dérange les sceptiques. Mais nous vivons avec quantité de choses que nous ne connaissons pas ! C’est même ce qui motive les chercheurs : trouver et comprendre ce que nous ne connaissons pas... encore. La science ne peut pas, actuellement, tout expliquer ? Exact. Mais elle possède les moyens de constater ou pas l’existence d’un phénomène, première étape du processus de recherche. Et, malgré ce qu’essaient de faire croire certains, on attend toujours la validation des dogmes de l’astrologie, d’une capacité de voyance ou de psychokinèse... Ne pas croire aux parasciences serait avoir l’esprit fermé ? Non. Simplement, nous n’avons pas l’esprit ouvert à toutes les affirmations. Nous laissons à l’extérieur celles qui ne sont pas testables (exemple : il y a un fantôme dans cette pièce mais il disparaît lorsque l’on veut le voir...). Et si nous devions invoquer quelque chose, ce serait l’esprit critique. Rappelons que lorsque l’esprit est trop ouvert, il se vide !

Si nous n’acceptons pas les affirmations des tenants du paranormal, c’est par simple positionnement idéologique.. Nous laissons ce genre de positions aux idéologues... Que l’on nous démontre la validité d’un énoncé, avec toute la rigueur que cela implique, et nous l’accepterons. Démontrez à un tenant du paranormal que ce qu’il vous avance ne tient pas, et il ne renoncera pas à croire que, quelque part ou un jour, les faits confirmeront sa pensée. De quel côté est l’idéologie ?

(11) L’argument économique

Très présent chez les défenseurs des « médecines parallèles » : celles-ci mettraient en péril l’industrie pharmaceutique. On trouverait là la cause de leur non-validation par les scientifiques... Rappelons simplement que des industriels tels que Boiron (premier laboratoire mondial d’homéopathie) ou Dolisos sont aussi des géants financiers. Et que, bizarrement, seules les évaluations financées par ces laboratoires donnent des résultats positifs pour l’homéopathie (ce que leur réplication par des laboratoires indépendants ne confirme jamais...). De plus, les géants pharmaceutiques investissent aussi dans des entreprises produisant des produits tels que compléments alimentaires, phytothérapie, homéopathie : simplement parce que ces produits remportent un succès commercial... Exemple avec la vitamine C, vantée pour ses prétendus bienfaits sur le cancer par le Linus Pauling Institute, référence permanente des tenants des médecines « alternatives » : la corporation qui contribue financièrement le plus à cet institut est la maison Hoffmann-La Roche, le géant pharmaceutique qui produit le plus de vitamine C dans le monde.

(12) L’argument « Prouvez-moi que c’est faux ! »

Souvent employé aussi. Une personne sachant qu’il y a débat sur un sujet (astrologie, voyance...) dit : A vous, sceptiques et scientifiques, de prouver que c’est faux ! Non, non... La charge de la preuve appartient à celui qui affirme. En clair, si vous pensez posséder le pouvoir de soulever des objets par la force de la pensée, c’est bien à vous d’en faire la démonstration. Il y a une impossibilité à démontrer l’inexistence de ce qui... n’existe pas, ou ne peut se vérifier.

(13) L’argument « Vous me dites ça à moi qui n’est pas spécialiste, mais si vous en aviez un en face... »

Nous lui dirions pareil. Il faut savoir que nous attendons toujours le « spécialiste » qui apportera les éléments solides nécessaires à la reconnaissance de phénomènes réputés actuellement « paranormaux ». Enfin, le seul spécialiste officiel du paranormal en France, c’est le professeur Henri Broch, de l’université de Nice-Sophia-Antipolis, qui enseigne l’approche scientifique des phénomènes réputés paranormaux, et dirige le « laboratoire universitaire de zététique Jacques Théodor ». Si une personne vous parle d’un « laboratoire universitaire » toulousain consacré au paranormal, sachez qu’il s’agit d’une structure privée, sans existence légale, et sans rapport avec l’université. Même si son animateur et certains médias ont tenté à plusieurs reprises de le faire croire...

Tous ces arguments sont autant de processus défensifs visant à protéger un élément dont les tenants du paranormal n’ont pas toujours conscience : la croyance, envers et contre tous, au paranormal.

À eux de nous donner maintenant de bons arguments. La discussion pourra alors avancer.