Scanner médical et risque de cancer
Publié en ligne le 4 décembre 2025 - Technologie -
Un article sur le risque de cancer associé à l’usage des scanners médicaux paru dans le JAMA Internal Medicine le 14 avril 2025 [1] a donné lieu à une couverture médiatique importante [2, 3, 4]. Il s’agit d’estimer le nombre des cancers attendus dans l’avenir qui seront les conséquences des 93 millions de scanners effectués aux États-Unis en 2023 sur 61,5 millions de patients dont 4,2 % d’enfants.
Les doses de rayonnements délivrés par les différents types de scanner aux organes cibles ont été estimés en fonction de l’âge, du sexe et du type de scanner. Les risques des différents types de cancer en fonction de la dose de rayonnements aux différents organes ont été estimés en utilisant les modèles du « Biological Effects of Ionizing Radiation VII » du National Research Council.
Cette étude montre que, compte tenu de l’utilisation actuelle et des doses d’irradiation, les scanners faits en 2023 devraient entraîner environ 103 000 cancers futurs au cours de la vie des patients exposés, dont 10 000 à cause des scanners chez les enfants et 93 000 à cause des scanners chez les adultes. Il ne s’agit pas d’un risque annuel : 103 000 est le nombre de cancers attribuables aux scanners reçus en 2023 que l’on s’attend à observer au cours de la vie entière des personnes exposées. Donc chez ces 61,5 millions de personnes exposées à un ou plusieurs scanners en 2023, on s’attend à observer 1,7 cancers sur 1 000 personnes.
Ce travail repose sur les estimations des risques de cancer tirées de la synthèse de très nombreuses enquêtes qui, depuis l’étude des survivants d’Hiroshima et Nagasaki, ont porté notamment sur les travailleurs exposés aux radiations ionisantes (dans les installations nucléaires, les hôpitaux, les mines) et sur les patients exposés aux faibles doses délivrées par les examens diagnostiques ou exposés à de plus fortes doses de radiothérapie. L’excès de risque relatif 1 est estimé pour différentes classes de dose.
La relation entre les excès de risque relatif aux différentes classes de dose et la dose est modélisée. La comparaison de différents modèles montre que ce risque dépend de l’organe exposé, de la dose reçue par cet organe, de l’âge à l’exposition, du sexe et de l’âge atteint. La relation entre l’excès de risque relatif et la dose est une relation linéaire pour les cancers solides (proportionnalité) et une relation du second degré (au carré, donc une croissance plus rapide qu’avec une proportionnalité) pour les leucémies.
Les doses d’irradiation délivrées par un scanner dépendent de l’organe examiné et de l’organe cible [5]. Un scanner thoracique délivre par exemple une dose environ 300 fois plus importante sur le poumon que sur le côlon : 22 mSv (millisieverts) versus 0, 07 mSv. Certaines de ces doses correspondent ainsi à la dose reçue en plusieurs années d’exposition à la radioactivité naturelle, dont la dose annuelle est 3 mSv hors exposition médicale.
En conclusion, les résultats de cette étude encouragent à limiter l’usage des scanners en utilisant si possible des techniques d’imagerie alternatives. Les examens IRM et échographiques n’exposent pas aux radiations ionisantes, et les doses délivrées par les radiographies sont globalement environ dix fois plus faibles que celles délivrées par les scanners du même organe. Mais si un patient a vraiment besoin d’un scanner, il faut le faire sans hésitation. Tout est dans la balance bénéfice-risque.
1 | Smith-Bindman R et al. , “Projected Lifetime Cancer Risks From Current Computed Tomography Imaging”, JAMA Internal Medicine, 2025, 185 : 710-19.
2 | Chayet D, « Les scanners pourraient être à l’origine de 5 % des cancers aux États-Unis », Le Figaro, 16 avril 2025.
3 | Tellier P, « Scanner et risque de cancer : au-delà des chiffres choc », Journal international de médecine, 17 avril 2025.
4 | Louvet B, « Une grande partie des cancers diagnostiqués pourraient être causés par cet appareil : doit-on vraiment s’inquiéter ? », Sciencepost, 26 avril 2025. Sur sciencepost. fr
5 | Marant-Micallef C et al. , “The risk of cancer attributable to diagnostic medical radiation : Estimation for France in 2015”, Revue d’Épidémiologie et de Santé Publique, 2019, 144 : 2954-63.
1 Risque dans la population exposée-Risque dans la population contrôle =Risque relatif-1
Publié dans le n° 353 de la revue
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L'auteur
Catherine Hill
Catherine Hill est épidémiologiste et biostatisticienne, spécialiste de l’étude de la fréquence et des causes du (…)
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